Un an après "Viridiana", Luis Bunuel, toujours exilé au Mexique signait "L'Ange Exterminateur", film fantastique au concept proprement génial. Prenez une grande réception bourgeoise, faites partir les domestiques, laissez les aristocrates entre eux et empêchez-les de sortir de la maison, sans que l'on ne sache pourquoi ni comment... Ah, les classes dominantes aux prises avec leurs vieux démons et ce cher Luis qui s'amuse à faire ressortir tous leurs vices... Un cheval de bataille indémodable pour un cinéaste régulièrement inspiré et jamais calmé intérieurement ! Bref, en-dehors de cette inévitable mise en bouche, "L'Ange Exterminateur" ne respire pas le "tout est politique", loin de là. Au contraire, L.B. tente de construire un pur récit de genre à travers un conte surnaturel dans lequel il inclura même quelques (tentatives d') effets spéciaux. Si le point de départ est comme je l'ai souligné plus haut excellent, la suite laisse à désirer. Pour une fois, la caméra de Bunuel n'est guère inspirée, restant en retrait, comme compressée dans un huis-clos dont elle ne parvient à faire ressortir aucune tension. Les plans sont tout à fait carrés et sans inventivité, le montage est on ne peut plus académique, le travail sur la lumière convenu ; et ce rythme, ronfffllle... Heureusement que je ne l'ai pas démarré tard le soir, sinon je crois que je n'y aurais pas survécu ! Le moins que l'on puisse dire, c'est que l'on s'ennuie certes poliment mais de manière tout à fait ferme. Ca me rappelle ces nouvelles fantastiques de Maupassant, où l'auteur était visiblement emballé par ce qu'il entreprenait bien qu'il ne fut à aucun moment capable d'imprimer un quelconque suspense, et ce malgré un beau maniement de la langue : ou comment se détruire en faisant quelque chose d'inhabituel sans tenter vraiment d'adapter son style au contexte... Lé dénouement est soigné et la technique évidemment correcte ; n'empêche, une heure trente quand on a rien à dire, ça fait long pour le spectateur.