Acteur de légende, Burt Lancaster n'a pas longtemps tardé à se lancer dans la production, en fondant sa propre compagnie, Norma Productions et aimait, d'une manière générale, à avoir la maîtrise des films dont il était le héros. Ainsi, pour Le Train, comme sur Le Prisonnier d'Alcatraz, il n'hésite pas à remplacer Arthur Penn par John Frankenheimer qui l'avait déjà dirigé dans Le Prisonnier d'Alcatraz et qu'il retrouvera pour Les Parachutistes arrivent.
Adapté de l'ouvrage biographique homonyme de Thomas E. Gaddis paru en 1955, Le Prisonnier d'Alcatraz est l'adaptation de l'histoire vraie de Robert Stroud. Ce détenu hors-norme, proxénète à ses heures et auteur d'oeuvres pédophiles, fut incarcéré en 1911 pour le meurtre d‘un tenancier de bar (qui avait refusé de payer l'une de ses prostituées), d'abord dans le pénitencier fédéral de McNeil Island, puis dans celui de Leavenworth dans le Kansas, où il tua ensuite l'un des gardiens puis un co-détenu. Condamné à mort, il vit sa peine commuée en emprisonnement à perpétuité en 1920 par le Président Wilson.
Recueillant et soignant un jour un oiseau dans sa cellule, il se prit de passion pour les volatiles, et devint un véritable spécialiste de l'ornithologie, mondialement reconnu pour ses travaux sur les maladies des oiseaux (il en éleva ainsi près de 300 dans sa cellule). D'où son surnom de "Birdman". En 1942, il fut transféré à la prison d'Alcatraz, où il passa 17 années, avant d'être envoyé au centre médical pour prisonniers de Springfield (Missouri), où il mourut d'une crise cardiaque en novembre 1963. Robert Stroud passa 54 ans de sa vie en prison, dont près de 42 ans en isolement.
Dès 1958, soit trois ans après la publication de la biographie de Rober Stroud, les producteurs de la Twentieth Century Fox envisagèrent de porter son histoire à l'écran. Toutefois, le projet fut rapidement abandonné face aux pressions du Bureau Fédéral des Prisons. Il faudra attendre 1961 et l'aide précieuse apportée par Burt Lancaster à Guy Trosper, auteur du scénario et producteur du film, pour que soit mis en chantier Le Prisonnier d'Alcatraz. Fasciné par le personnage de Robert Stroude et par son histoire, Burt Lancaster voyait dans ce film un moyen de dénoncer l'aspect inhumain des prisons et l'archaïsme d'un tel châtiment.
Le Prisonnier d'Alcatraz marque la seconde collaboration entre le comédien Karl Malden et le réalisateur John Frankenheimer, qui l'avait dirigé peu de temps auparavant dans All Fall Down.
Comédien légendaire, Burt Lancaster est également un producteur avisé. Après à peine 4 années de comédie, il se lance dans la production en créant sa propre compagnie, Norma Productions. On lui doit notamment les productions de La Flèche et le flambeau (1950), Marty (1955), Trapèze (1956), Le Grand Chantage (1957), Le Vent de la plaine en 1960, Le Prisonnier d'Alcatraz (1962), Fureur apache (1972) ou encore Un Flic se rebiffe (1974 - également réalisateur). A l'exception de Marty, Burt Lancaster tenait la vedette de chacun de ces films. Par ailleurs, il est intéressant de noter que Burt Lancaster a tourné une partie des scènes du Corsaire rouge (1952).
Enorme succès commercial et critique inspiré d'une histoire vraie, Le Prisonnier d'Alcatraz (1962) fut marqué par la composition émouvante et admirable de Burt Lancaster, récompensé d'un prix d'interprétation au Festival de Venise.
Le Prisonnier d'Alcatraz marque la seconde collaboration de Burt Lancaster avec le cinéaste John Frankenheimer, après Le Temps du châtiment en 1961. Les deux hommes se retrouveront en 1964 sur Le Train et Sept jours en mai, puis en 1969 sur The Gypsy Moth.
La bande originale du Prisonnier d'Alcatraz est signée du légendaire Elmer Bernstein. On lui doit notamment la musique des Dix Commandements, La Grande évasion, Les Sept mercenaires, ou du Gangs of New York de Martin Scorsese.
Plus âgée de huit ans que son partenaire Burt Lancaster, Thelma Ritter se vit pourtant confier le rôle de sa mère dans le film. Sa performance fut saluée par une nomination à l'Oscar du Meilleur second rôle féminin en 1963.
Le Prisonnier d'Alcatraz marque la seconde collaboration de Burt Lancaster et de Telly Savalas (célèbre interprète de Kojak), après Le Temps du châtiment en 1961. Les deux acteurs se donneront à nouveau la réplique dans Les Chasseurs de scalps en 1968.
Avant que John Frankenheimer ne prenne les commandes du Prisonnier d'Alcatraz, la réalisation du projet fut confiée au Britannique Charles Crichton. Pourtant, après plusieurs semaines de tournage, il fut limogé par Burt Lancaster, alors insatisfait du "bout-à-bout", la première version du montage. John Frankenheimer, qui avait dirigé le comédien peu de temps auparavant dans Le temps du châtiment, le remplaça au pied levé. Toutefois, ses relations avec l'acteur-producteur ne furent pas toujours au beau fixe, et après un premier montage du film, ce dernier décida de recommencer la totalité du tournage... Producteur affirmé, Burt Lancaster agira de même en 1964 sur Le Train, et remplacera le réalisateur Arthur Penn par... John Frankenheimer.
Outre Le Prisonnier d'Alcatraz, Burt Lancaster et Edmond O'Brien se sont déjà donnés la réplique devant l'objectif de John Frankenheimer dans Sept jours en mai en 1964 (qui vaudra à O'Brien une nomination à l'Oscar du Meilleur second rôle masculin). C'est en 1946 qu'O'Brien et Lancaster ont débuté leur collaboration dans Les Tueurs, le premier film du second nommé. Enfin, notons que Burt Lancaster retrouvera John Frankenheimer sur le film d'aventures 99 and 44/100% dead en 1974.
La célèbre prison d'Alcatraz, dans la baie de San Francisco, a été le théâtre d'une dizaine de longs métrages. Parmi ceux-ci, on retiendra surtout, outre Le Prisonnier d'Alcatraz, Le Point de non retour (1967), L'Evadé d'Alcatraz (1979), Meurtre à Alcatraz (1995) ou encore Rock (1996). Pour l'anecdote, certains sons de L'Empire contre-attaque furent également enregistrés sur "le rocher".
Le tournage du Prisonnier d'Alcatraz restera un souvenir sombre et triste pour Burt Lancaster. Ainsi, son frères James, très proche du comédien, fut emporté par une crise cardiaque sur le plateau en janvier 1961, à l'âge de 50 ans...
Sorti sur les écrans américains en juillet 1962, Le Prisonnier d'Alactraz a été cité à quatre reprises lors de la cérémonie des Oscars en 1963 : nommé à la statuette du Meilleur comédien (Burt Lancaster), du Meilleur second rôle masculin (Telly Savalas), du Meilleur second rôle féminin (Thelma Ritter) et de la Meilleure photographie, il repartit les mains vides. Le film se vit également décerner le BAFTA du Meilleur acteur étranger et la Coupe Volpi du Meilleur comédien à Venise pour Burt Lancaster, et fut sélectionné dans la course au Lion d'Or à la Mostra 1962.
Le portrait que Le Prisonnier d'Alcatraz dresse de Robert Stroude est assez éloigné de la vérité historique sur de nombreux points. Ainsi, le détenu-ornithologue ne fut jamais en contact avec des oiseaux à Alcatraz, les cellules étant sans fenêtres dans la prison (il mena ses études sur les volatiles à Leavenworth uniquement). Plus important, loin de l'interprétation sympathique et humaniste de Burt Lancaster, Robert Stroud fut décrit par les gardiens et ses co-détenus comme un véritable meurtrier en puissance et un psychopathe très intelligent, machiavélique et manipulateur. Mais, conséquences du son passage sur grand écran, il passa, après la sortie du film, pour un homme des plus aimables, tant et si bien que de nombreuses personnes écrivirent des lettres pour obtenir sa libération !
Peu après la fin du tournage, Burt Lancaster parvint à rencontrer Robert Stroud. Autorisation que n'obtint jamais le réalisateur John Frankenheimer. Pour sa part, le "Birdman" Robert Stroud ne fut jamais autorisé à voir le long métrage, pourtant basé sur sa propre vie. Il mourut un an après la sortie du film.
Le Prisonnier d'Alcatraz s'inscrit sur la longue liste de collaboration entre Burt Lancaster et Whit Bissell. Ainsi, avant ce film, les deux comédiens s'étaient donnés la réplique dans le drame Les Démons de la liberté (1947), les westerns Règlement de comptes à O.K. Corral (1957) et Sur la piste de la grande caravane (1965), le thriller Sept jours en mai (également signé John Frankenheimer en 1964), et le thriller dramatique Airport en 1970.
Le Prisonnier d'Alcatraz a été tourné sur la véritable île d'Alcatraz, où fut véritablement incarcéré Robert Stroud.