On prend les même et on recommence ! Une année et un film après « Le Faucon Maltais », John Huston réunit à nouveau Humphrey Bogart, Mary Astor et Sydney Greenstreet (ainsi que Arthur Edeson à la photo et Adolph Deutsch pour la musique) pour réaliser « Across The Pacific ». On y suit Rick Leland, renvoyé de l’armée américaine, s’embarquer sur un navire japonais où il va faire d’intéressantes connaissances…
Passé un début où Huston met en place l’histoire et laisse planer une ambiguïté sur certains personnages, il rentre assez vite dans le vif sujet pour nous faire suivre une histoire d’espionnage qui, à défaut d’être crédible, est plutôt efficace malgré quelques facilités dans le déroulement. Il a la bonne initiative de braquer sa caméra presque tout le temps sur le personnage de Rick Leland, intéressant à suivre, parfois ambigu et dont la relation avec le personnage féminin s’avère très bien écrite. Les joutes verbales qu’ils s’échangent sont souvent piquantes et fort sympathiques (malgré quelques touches d’humour qui, sans être lourde, sont inutiles). L’atmosphère sombre est plutôt bien rendue.
A défaut d’être transcendant, c’est plutôt bien rythmé, divertissant et servi par d’excellents comédiens. Une fois de plus, Humphrey Bogart rentre à merveille dans la peau de ce personnage qui devra mettre à mal les plans d’un ennemi. Ses compagnons de « Le faucon Maltais » sont aussi impeccables et notamment Sydney Greenstreet qui cache très bien son jeu.
Film de propagande comme Hollywood en a tourné beaucoup (avec de très belle réussite comme « Chasse à l’homme » de Lang ou « Lifeboat » d’Hitchcock), « Griffes Jaunes » évite de tomber dans la lourdeur dont ce genre de films était propice. Malgré un petit côté manichéen (notamment dans la vision des Japonais, le film est mis en scène peu de temps après l’attaque de Pearl Harbor), il n’insiste pas vraiment dessus, se concentrer sur l’intrigue et les rapports entre Bogart et Astor.
Pour l’anecdote, ce n’est pas John Huston qui termine la réalisation. Participant à l’effort de guerre (il entre dans l’équipe des cinéastes militaires de l’U.S. Army sous la direction de Frank Capra) il est remplacé par Vincent Sherman pour les scènes finales.
A défaut d’être l’une des plus grandes réussites de son réalisateur, c’est néanmoins efficace, divertissant et porté par de solides interprétations.