Parmi les DVD d'horreur à 1€ qu'on chinait chez le buraliste dans notre jeunesse ("prends le journal, et ce que tu veux avec la monnaie"), se trouvait Cabin Fever, qui s'est vite démarqué à nos yeux des autres séries B d'épouvante par son irrévérence, son envie folle de jouer avec le genre, en y mettant une bonne dose d'humour noir et quelques scènes vicelardes. Avec un budget de 1 million de dollars (une pacotille), on s'étonne des prothèses corporelles très bien faites, crades juste ce qu'il faut, jamais caricaturales, et on aime tellement mieux le beau travail de maquilleurs et truquistes aux effets spéciaux numériques très fades. Entre hilarité et dégoût, le premier film d'Eli Roth est d'une générosité grande et sincère, alternant l'humour noir (le gars qui ne veut surtout pas avoir de contacts avec les malades qui finit...
dégommé par les flics
, ou encore l'ado qui dit au plouc du coin de rajouter une pancarte pour ne pas s'asseoir à côté de "Denis",ce qui est fait plus tard dans le film) et les scènes-chocs (l'échelle
qui casse et envoie le héros baigner à côté du corps infecté...
), dont la meilleure scène est celle qui mêle les deux : la scène du rasoir. On s'en rappelle à vie, de cette scène qui mêle détresse de la jeune fille qui veut encore avoir une emprise sur sa décrépitude, veut encore "être belle, être humaine, tout simplement" en se rasant les jambes, et horreur pure avec le rasoir qui embarque plus que les poils... On ne sait pas si l'on doit rire, avoir pitié, ou être horrifié, on tire donc une tronche composite devant ladite scène, et c'est pour cela qu'elle reste en tête si facilement, Eli Roth déployant son talent de réalisateur d'horreur qui joue sur le fil du rasoir (littéralement), ce qui fera sa notoriété avec les Hostel notamment. On adhère d'emblée à cette histoire de potes qui vont dans une cabane dans les bois (le postulat ringard de base) qui sont aux prises d'une maladie inconnue et très contagieuse, qui fait décrépir ses porteurs, avec un regard de jeune réalisateur aime le gore, le décalé, et qui fait un bien fou. On ne peut voir Cabin Fever autrement qu'un film de passionné, qui fait avec les moyens du bord (peu riches, et avec le réalisateur et son frangin qui tiennent des rôles : pas une thune, on vous dit), mais avec une envie folle, avec plein d'idées dans la tête, et surtout sur la tête : il paraît que Cabin Fever vient de la panique générée par la découverte de Eli Roth de son psoriasis... Quand les petites pellicules donnent la grande.