Cette Fedora n'a bien sûr rien à voir avec la pièce de Victorien Sardou, adaptée au cinéma en 1916 et en 1942. Le film s'inspire d'une nouvelle de Tom Tryon, ex-acteur devenu écrivain, dont la littérature avait déjà inspiré Robert Mulligan, en 1972, pour la réalisation de L'Autre (The Other). Billy Wilder avait probablement vu dans la nouvelle de Tryon une occasion de raviver les thématiques de son chef-d'oeuvre, Boulevard du crépuscule (Sunset Boulevard), et ainsi de relancer sa carrière plutôt sur le déclin. Comme dans Boulevard du crépuscule, il est en effet question ici d'une ancienne star hollywoodienne, de sa grandeur et de sa décadence, de son âge... Mais autant Wilder avait réussi, en 1950, à ruser pour produire sa première satire d'Hollywood au sein même d'Hollywood, autant, en 1978, il n'a pas pu refaire le coup. Faute de financement aux États-Unis, il s'est appuyé sur une coproduction franco-allemande pour flinguer, à distance, l'univers du cinéma états-unien et son star-system. Un univers de faux-semblants, de fausse magie, de fausses légendes, qui fabrique des idéaux impossibles (l'éternelle jeunesse) et des monstres à la fois égocentriques et schizophréniques. En témoigne l'histoire de cette Fedora, marquée par quelques excès en matière de chirurgie esthétique et quelques abus dans sa relation avec sa fille. Manipulation, illusion médiatique, piège identitaire... Le scénario est assez mystérieux et maintient la curiosité en éveil tout du long. La mise en abyme s'avère elle aussi intéressante, sans renouer malheureusement avec la subtilité cinglante et la puissance dramatique de Boulevard du crépuscule. Quelques éléments romanesques tirés par les cheveux (concernant le physique et l'âge des protagonistes), quelques maladresses de narration (rien n'oblige le personnage de la comtesse à se confesser au producteur de cinéma) et quelques effets mélodramatiques appuyés (notamment via la musique) font de cette Fedora une oeuvre inférieure à son aïeule de 1950. Cet avant-dernier long-métrage de Wilder (avant Buddy Buddy, 1981) mérite cependant le coup d'oeil pour son regard critique, associé à une élégance de toujours en matière de réalisation.