Petit polar assez simple des années 50, mais qui s’avère assez efficace grâce en particulier à un truand vraiment truand. Parfois les truands des vieux films ont quelque chose de spécialement flamboyant et on évite de trop montrer ce qu’est la réalité de la violence du milieu. Là, Charles Vanel, excellent du reste, campe un méchant sans pitié, mais assez ambigu, car il n’est pas non plus dénué de sentiments primaires, notamment à l’égard de Bella Darvi, vraiment très charismatique. Elle est belle, et en même sombre, très femme fatale dans le bon sens du terme. On notera également les ambiguités du personnage de Piccoli, certes flic sérieux, mais avec des pratiques douteuses (même à l’époque !) et qui a avec les femmes un rapport particulier. Il n’est pas tout blanc, et le film embrouille avec habileté les lignes parfois manichéennes qui séparent les truands des policiers. Il y a aussi de bons seconds rôles, notamment Danik Patisson et Monique Tanguy côté féminin, et François Guérin côté masculin.
Ce bon casting est au service d’une histoire assez simple, et qui manque un peu de gros rebondissements. Néanmoins, le film propose pas mal de scènes fortes. Il y a de la tension, du suspense, et le film sait se montrer assez méchant pour créer des retournements de situation inattendue (par exemple avec le personnage de Marcel Mouloudji). On ne sait jamais jusqu’où le film va aller, ce qui a le mérite d’entretenir le suspense, notamment dans cet épilogue d’une violence étonnante pour l’époque, même si bien entendu tout est fait très proprement (trop).
C’est là où je mettrai quand même un bémol, le film se veut violent et radical dans ses intentions, après dans l’exécution les scènes de violence reste très proprettes. Le film ose davantage dans l’érotisme, en particulier avec les personnages de Bella Darvi et Monique Tanguy, mais pas sur les impacts de balles et les explosions. Le film reste aussi assez restreint dans ses décors, avec beaucoup d’intérieurs, très peu d’extérieurs, et la bande son, signée Michel Legrand pourtant, casse les oreilles ! Maintenant le noir et blanc est plutôt beau et la réalisation tient la route. Pierre Chenal ne fait pas preuve d’une particulière imagination, mais en réalisateur expérimentée, il livre une mise en scène assez efficace pour ne pas susciter l’ennui.
Pour ma part, Rafle sur la ville m’a agréablement surpris pour certains partis pris assez radicaux en terme de violence et de sensualité. Les dialogues sont bons et les acteurs très convaincants (Piccoli et Vanel en tête). L’ensemble est un divertissement méconnu qui vaut la découverte pour les amateurs de polars anciens. 3