A mesure que je plonge dans l'Oeuvre de Sokourov je découvre un cinéma richement méditatif, situé quelque part entre le ciel et la terre, un univers constitué de longs gestes, larges ou tourmentés, de regards perdus dans le vide, orientés vers le sable ou les nuages, de larmes ravalées dans le calme et la dignité... Univers d'ouverture au coeur duquel la parole n'a qu'un rôle secondaire, contingent, où les images installent l'attente sans jamais installer l'ennui. Le Jour de L'eclipse, film surgi de nulle part, d'une lumière pharaonique, d'un rythme apaisant, comme en suspens, est un chef d'oeuvre contemplatif en forme d'épopée désespérante. Sokourov filme un idéaliste entouré de la chaleur et du vacarme, le situant doucement dans un cadre étouffant, surchargé, transpirant, dans une temporalité difficilement réductible, quelque part entre l'aube de l'Humanité, les années 80 et la fin du Monde. Davantage encore que son modèle tarkovskien, Alexandre Sokourov capte et reconstitue, respectant le naturel mais aussi l'Art comme moyen de fabrication d'affects. Son film - comme son cinéma en général - est celui d'un temps scellé, céleste, ou la volonté de revenir aux essences s'affranchit de tout misérabilisme, de toute stigmatisation et de toute complaisance. C'est à pleurer de joie.