Pasolini qui adapte "Oedipe Roi" de Sophocle, voilà la promesse d'un bon film. Le cinéaste italien n'étant pas à son première essai d'adapter un mythe à son cinéma (L'évangile selon Saint Mathieu, Médée...) j'étais sûr de ne pas assister à une simple redite de l'oeuvre de Sophocle.
Et c'est exactement le cas. Le film de Pasolini est une vraie oeuvre de cinéma, avec ses défauts, et ses qualités. Toutefois il me semble important de scinder le film en deux parties, la seconde commençant après la rencontre d'Oedipe avec le Sphinx.
La première partie du long métrage est d'excellente qualité. L'introduction du film peut dérouter, mais est enfaite présente pour rendre le récit universel et intemporel. Une fois l'introduction passée, dès le premier plan, on comprend ce que sera le film, une adaptation aride et cru de la pièce de Sophocle, et cela autant dans la mise en scène que visuellement. Car avec "Oedipe Roi", Pasolini propose une oeuvre sèche, presque radical, où chaque contre plongée vers le soleil est annonciatrice de l'avancée d'Oedipe vers son destin tragique, le cinéaste transforme ainsi chacun de ces plans en une marche funèbre profondément fataliste, le tout au milieu de décors désertiques magnifiques.
Mais une fois la rencontre du Sphinx passée, Pasolini semble opérer un changement dans sa mise en scène, tout devient plus statique, et le cinéaste semble abuser des mêmes mouvements tout en abandonnant sa charge symbolique. C'est frustrant, car le récit captive toujours, mais s'avère bien moins mis en scène. De plus, et bien que ce défaut soit aussi présent dans la première partie d'une manière moins importante, le jeu de certains acteurs, celui d'Oedipe en tête, laisse vraiment à désirer. Le voir hurler de manière très peu naturel en déclamant son texte fini même pas agacer, autant par son manque de pertinence que par l'aspect taciturne du personnage dans toute la première partie.
Toutefois deux défauts, bien que très liés, sont présent dans tout le long métrage, à savoir le montage et la narration. Pour commencer les cartons de dialogues sont inutiles tant on comprend beaucoup par le simple regard des personnages. Ensuite, certains aspects du montage, comme les ellipses, manque parfois de perdre le spectateur dans un récit déjà bien assez riche.
"Oedipe Roi" reste une oeuvre bancal, toujours convaincante dans son récit, mais effectuant un virage dans sa mise en scène faisant perdre beaucoup d'intérêt au long métrage. Un film frustrant tant il aurait pu être meilleur, mais tout de même passionnante dans sa vision du destin et du fatalisme.