Stéphane quitte Natalia et commence une relation avec Sabine qui aime Bruno mais qui est parti avec une autre. Dit comme ça le synopsis ressemble furieusement à ceux des romans photos de type Nous Deux. Mais « L’enfant de l’hiver » est un film. Au cinéma deux possibilités : soit ce sera un vaudeville, pas vraiment le genre d’Assayas, soit ce sera un drame. Bingo, c’est même une tragédie, car c’est bien connu, les histoires d’amour finissent toujours mal. Le réalisateur et scénariste nous expose pendant près d’une heure et demie des passions, sans passion, avec une froideur aussi glaciale que le titre du film peut le faire penser. Car, à part les deux derniers plans (moins d’une minute), à aucun moment la moindre émotion se reflète sur l’écran, laissant tourner à vide la démonstration sur l’incommunicabilité. De ce parti pris contestable ressort une galerie de personnages antipathiques et inintéressants. Les trois hommes sont trois salauds, deux des trois femmes, Agnès et Sabine sont gravement fêlées du bocal. L’interprétation de Clotilde de Bayser qui tant bien que mal voudrait incarner, sans y parvenir, la biche blessée, n’est pas en cause, ni d’ailleurs aucun des interprètes. Au final, seul le personnage de Natalia (Marie Matheron) offre quelque empathie avec le spectateur et permet de ne pas sombrer dans l’indifférence la plus totale. Plutôt bien accueilli à sa sortie par une critique attendrie, Cahiers du Cinéma en tête, le film coche toutes les cases du cinéma intello à la mode. Aucune star médiatisée, à l’exception du has been Gérard Blain (le père) mais dans un rôle secondaire, économie de moyens quant à la photographie avec l’abus de plans américains et des zooms ralentis pour masquer l’absence de travelling, caméra à l’épaule (néanmoins sans tressautements) et distanciation (à la limité du désintérêt). Ainsi Assayas fut il comparé à l’ascétique Robert Bresson en oubliant que ce dernier, malgré tous les partis pris contestables de son œuvre, arrive la plupart du temps à embarquer le spectateur. Ce n’est clairement pas le cas de ce pensum prétentieux.