À l'origine, Ordet était une pièce de théâtre du pasteur danois Kaj Munk, auteur dramatique très connu dans les pays scandinaves, tué par les nazis en 1944. Cette pièce fut portée une première fois à l'écran par le cinéaste suédois Gustaf Molander, en 1944 sur une adaptation de Rune Lindström, scénariste et acteur du Chemin du ciel, d'Alf Sjoberg. Contrairement à Molander, qui jouait davantage sur la beauté de la nature, Dreyer est resté plus près de l'optique théâtrale en se cantonnant surtout dans les décors d'intérieurs.
Dans un entretien donné aux Cahiers du Cinéma en 1956, Eric Rohmer évoque le cinéma de Carl Theodor Dreyer : "Dreyer revendique l'héritage de la grande époque du cinéma allemand. Nous pourrions qualifier son art de véritable expressionnisme, si ce terme n'avait pas été quelque peu galvaudé. (...) Le cinéma ne nous a jamais donné l'exemple d'un art plus volontaire : mais son mérite n'est pas tant dans sa rigueur que le fait que celle-ci n'est jamais pesante, ne brime pas un seul instant la liberté du jeu, n'étouffe pas l'émotion du spectateur, mais au contraire l'avive, la mutiplie."
Carl Theodor Dreyer a simplifié beaucoup de choses dans Ordet afin de rendre l'action primordiale. Seules ont été tolérée les choses concernant directement l'action. Selon lui, on ne peut pas styliser la réalité sans la connaitre. Pour cela, il a demandé à la dame qui dirigeait la cantine d'aménager la cuisine du film comme si c'était la sienne, pour qu'elle s'y sente à l'aise. Elle a apporté pleins d'ustensiles. Dreyer et son chef opérateur Bendtsen en ont enlevé ensuite un grand nombre, faisant de la cuisine plus une notion qu'un véritable lieu encombré d'objets.
Ordet, réalisé par Carl Theodor Dreyer en 1955, a reçu le Lion d'Or au Festival de Venise. La perfection formelle et l'hardeur mystique de la dernière séquence (lorsque Johannes ressuscite Inger) firent sensation.