Au moment où le séduisant André s'apprête à se marier, Christian-Jaque revient sur les trois histoires sentimentales -sous la forme de trois sketches- qui ont précédé, et dont l'ironie est soulignée par la voix "off" de Claude Dauphin. Car un des aspects piquants de cette comédie sentimentale est de montrer comment le jeune premier Daniel Gélin et son personnage de séducteur, une fois n'est pas coutume et contre toute attente, subissent piteusement l'inconstance de ces "adorables créatures" que nous annonce le titre du film.
Parmi elles, les trois maitresses- successivement Danielle Darrieux, Martine Carol, Edwige Feuillère- ont en commun de répudier le jeune amant en vertu de leur humeur, de leur égoïsme, de leur vénalité même. N'en jetez plus! Avec autant d'humour que de misogynie, les auteurs (avec un Charles Spaak plutôt inspiré aux dialogues) proposent un catalogue de défauts estampillés féminins. Elles sont capricieuses et versatiles, perfides et jalouses, menteuses et, pourquoi s'arrêter là, voleuses...Un inventaire et des généralités à faire enrager la féministe la moins militante!
Ce point de vue permet néanmoins aux actrices citées plus haut de faire une joli numéro de femmes de caractère -et çà c'est une qualité. Et d'autre part, Christian-Jaque met en scène une jeune fille romanesque et moderne qui refuse catégoriquement de devenir l'épouse au foyer qui se flétrit et qui sert la soupe, comme sa mère. De quoi atténuer la charge?
Quoiqu'il en soit, je retiendrai de cette comédie assez plaisante...et perfide la sensualité brûlante et audacieuse de Martine Carol, filmée par son mari en sortie de bain, et la causticité attachée à la grande bourgeoise jouée par Edwige Feuillère, multipliant les soirées caritatives les plus saugrenues.
Et Daniel Gélin dans tout ça? Plutôt à l'aise et convaincant dans son contre-emploi.