Ken Russell n’a visiblement pas été très apprécié ou compris avec Le Repaire du ver blanc qui passe généralement pour être l’un de ses pires films. Franchement, c’est vrai que ça ne commence pas forcément mal, mais que sur le long terme ça devient peu digeste.
En fait le film possède surtout un atout, une Amanda Donohoe totalement déchainée ! Elle livre une prestation assez énorme, avec un personnage délirant à la fois drôle, sexy, effrayant, c’est une pure merveille et l’actrice apporte sa classe, son flegme, c’est vraiment fendard. Les scènes où elle apparait sont de loin les meilleures du film, avec notamment une séquence meurtre totalement réjouissante. Elle est entourée d’acteurs nettement moins engagés dans l’ensemble, avec un Hugh Grant décevant, très fade, mais il est loin d’être le seul ! En fait Donohoe écrase littéralement la concurrence si bien qu’elle a l’air seule sur la brèche dans un one-woman-show mémorable ! Elle est la grosse attraction du film !
L’histoire n’est pas spécialement enthousiasmante sur le long terme. Ok il y a de l’humour, et je crois que c’est ce qui sauve Le Repaire du ver blanc car on sent bien qu’on lorgne vers la comédie (la méchante qui joue au jeu du serpent !). La gradation n’est pas mauvaise non plus avec un final qui s’avère plus punchie, et dans l’ensemble on ne s’ennuie pas trop car il y a de vrais moments excessifs et délirants qui parviennent sans trop de mal à faire passer le temps. Néanmoins on ne peut nier que Russell ne maitrise pas très bien son récit. L’adaptation de Stoker reste faiblarde, on ne saura rien de ce culte païen, ça tourne longtemps autour du pot avant d’avancer, la faute à une dispersion dans plusieurs sous-intrigues. Même si ce n’est pas ennuyeux on ne pourra que constater aussi la prééminence des dialogues sur les scènes à spectacle, avec notamment une absence quasi-totale d’horreur. Les images psychédéliques sont aussi très mal introduites et alourdissent bien inutilement le film. Au bout du compte, sans vraiment rebuter, Le Repaire du ver blanc donne le sentiment d’un grand désordre foutraque, où le bon côtoie le moins bon voire le mauvais.
Coté réalisation on retrouve les tics de Russell, notamment avec ses inserts psychédéliques, son gout de l’étrange. Le film n’est pas si mal pour un budget minimaliste, avec des effets spéciaux et des maquillages corrects, mais on est très loin de la qualité formelle des meilleurs Russell. La photographie et les décors restent assez ternes, la bande son n’a pas une grande efficacité. Le réalisateur a visiblement hésité entre ses effets volontiers kitsch et baroque, ce qui apparait dans les scènes psychédéliques, une ambiance gothique plus classique par le château, la forêt, et une ambiance de film fantastique moderne avec une dimension scientifique. Comme pour l’histoire le mélange apparait brouillon, et avec des moyens limités ça donne forcément un résultat qui reste limité.
Finalement Le Repaire du ver blanc est surtout un film bizarre, excentrique. Ce n’est pas foncièrement mauvais, mais c’est une sorte de grand cirque avec de bons numéros et des numéros ridicules, où l’on peut côtoyer d’une scène à l’autre l’excellent et le mauvais. C’est presque comme si deux hommes avaient réalisé ce film, un qui le prenait avec sérieux cherchant à donner un cachet original à l’histoire, et un qui voulait en faire une franche parodie délirante ! Le résultat laisse dubitatif. 2.