" Ken Park ", quatrième film de Larry Clark après " Kids ", " Another day in paradise " et " Bully ", est, à l'instar des trois premiers, une grande réussite. Grand photographe américain, Clark est passé au cinéma sur le tard, et prolonge par le biais de ses films son travail photographique et sa thématique principale, en chantier depuis plusieurs décennies : l'observation quasi entomologiste de la jeunesse américaine. Mais les jeunes que filme ou photographie Clark sont à l'opposé de l'imagerie américaine habituelle ou de la Bush génération. Clark montre les ados tels qu'ils le sont vraiment : ils glandent, ils baisent, ils se droguent, ils sont en plein conflit avec leurs parents, et parfois, ils se suicident. C'est le cas de Ken Park, jeune adolescent que nous aurons à peine le temps d'apercevoir en ouverture et en clôture de ce film aussi dur que beau. Entre temps, le spectateur tenu de bout en bout en haleine, aura partagé des instants de vie de quelques adolescents : un jeune fou malsain qui se masturbe et qui maltraite ses grands-parents, une gamine qui ne pense qu'à baiser alors que son père, religieux intégriste, entretient avec elle des rapports aussi ambigus que malsains, un jeune qui ne s'intéresse qu'au skate en plein conflit avec son gros beauf de père... Plusieurs évolutions dans le travail de Clark : il cosigne le film avec son chef opérateur Ed Lachman dont la photographie est fantastique de naturalisme tout en étant esthétiquement parfaite ; et il s'intéresse enfin aux parents, les intégrant dans sa réflexion sur l'adolescence américaine et sur le malaise de cette jeunesse. Surtout, un magnifique plan cul, où trois ados baisent dans un moment magique où le temps semble suspendu, où le bonheur est, enfin, perceptible et appréhendable. Bien que bandante, cette séquence est surtout belle, émouvante et pleine de poésie, donnant à ce film sombre une petite lueur d'espoir.