Le moins que l'on puisse dire, c'est que "Lost In Translation" procure une sensation très bizarre tout au long de sa vision et qu'il s'agit de quelque chose que j'ai rarement ressenti cinématographiquement. Il n'y a aucun cliché, aucun air de déjà-vu, c'est unique. On ne sait même pas dans quel film on est : s'agit-il d'une chronique, d'un drame, d'une histoire d'amour, voire d'une comédie ? On est en droit de se poser la question car il n'y a ni influences ni références marquées. C'est vraiment une oeuvre extrêmement personnelle qui a été réalisée par une auteur à part entière, ce qui est très prometteur. Jamais Sofia Coppola ne dirige ses acteurs comme d'autres l'auraient fait : jamais elle n'obtient un plan qui soit dans l'ordinaire. Tout le temps, du début à la fin, il y a une recherche omniprésente dans tous les compartiments afin de faire passer des émotions complètement inédites. On a l'impression d'être dans une sorte de rêve. Oui, c'est tout à fait cela : lorsque le générique s'achève, c'est comme si une nuit se terminait, riche en imaginaire et en originalité. De scénario réel, il n'y a pas : ni intrigue, ni profondeur réelle des personnages, du moins dans l'écriture. C'est seulement après, pas sur le fond, mais sur la forme, qu'ils se révèlent. Et ils sont humains tout simplement. Pas de profonde réflexion, ni de mouvements de caméra inutiles. Pas de montage rythmé : juste une ambiance, magique, qui ne demande qu'à être revécue plus tard. Voici l'émergence d'un nouveau talent du cinéma : il s'agit d'une femme et elle est la fille d'un des plus grans géants de tous les temps. Pourtant, ce n'est pas l'univers de son père que l'on retiendra, mais le sien, car si particulier, à mettre à part. On ressort comme apaisé de cette oeuvre abstraite, novatrice, déroutante, mais par moments splendide. Et tout cela est obtenu sans une stylisation forcée pour se faire remarquer mais naturellement : et ça, c'est très fort.