Dernier film de Sofia Coppola que je découvre. Si les trois autres m'ont toujours fait ressentir quelque chose de spécial, s'ils ont su me fasciner et me troubler, il n'en est pas de même pour ce Lost in Translation. Il s'agit pourtant de son film le plus salué par la critique, qui lui a valu l'oscar du meilleur scénario original et qui lui a permis de se confirmer comme une réalisatrice majeure de la nouvelle ère.
On retrouve dans ce long-métrage deux de ses thèmes phares : L'isolement et la célébrité.
Quoi de mieux que Tokyo pour faire retranscrire cette perdition. Entre décalage horaire et difficulté de communication, le personnage principal se retrouve rapidement dans un état aussi terne que possible. L'hôtel dans lequel il séjourne devient le berceau de son ennui. Caractérisé par cette plastique sombre, il s'y engouffre, comme s'il plongeait dans le néant.
Poursuivi par les insomnies, on le retrouve errer la nuit, à la recherche d'une quelconque distraction. Cette distraction il la trouvera en la personne de Charlotte (Scarlett Johansson). Liés par de nombreux points communs, seul l'âge sera leur véritable barrière. Quand l'un regardera ses années passées avec mélancolie, l'autre s'angoissera de ses années futures, avec toujours le même dépit en toile de fond.
L'un se contentera de se noyer dans l'alcool (petite référence à la publicité qu'il est venu tourner), l'autre le fera dans la cigarette. Ces deux activités, répétitives et d'une futilité sans commune mesure, seront assez discrètes mais révélatrices de toute la peine du duo.
Quelques escapades dans les rues de Tokyo : Une ville agitée, colorée, parfois drôle et douce, mais dans laquelle les personnages n'y verront la plupart du temps que du noir, sous l'emprise de leur propre chute. La vie est regardé sous leurs yeux, et devient une vie semé d'ennuis et d'illusions rapidement effacées.
Un début de romance qui paraît avorté, une incapacité à se sortir de cette torpeur et un rythme linéaire tout au long du film. Leur séjour dans l'hôtel apparaît comme une bulle intemporelle dans laquelle ils parviennent à mêler le charme d'une rencontre à la dépression de la fadeur de leur vie. Mais ils ne parviennent jamais véritablement à se détacher de qui ils sont.
Le film est profondément intimiste, presque trop, et les instants où les choses semblent pouvoir s'arranger sont si brefs qu'on les oublie juste après. Le long-métrage est perdu dans le temps, de la même manière que les personnages sont perdus dans la vie, entourés d'un flot continu d'activités et de personnes inutiles. Un père de famille qui ne donne pas l'impression d'en être un, une épouse qui ne donne pas l'impression d'en être une ; et un couple naissant qui ne donne pas l'impression d'en être un non plus. Le désir est d'ailleurs représenté avec justesse, à la fois présent et absent, comme les personnages.
La conclusion est logique dans ce trajet à sens unique, qui semble former une boucle.
Le talent de Sofia Coppola est toujours repérable et ses thèmes traités avec beaucoup de finesse. Pourtant, que ce soit au travers des acteurs, des couleurs, de la narration ou du montage, je n'ai pas su être saisi comme il le fallait. L'ennui des personnages s'est répercuté sur moi sans que je ne parvienne à trouver un souffle intriguant et plaisant au long-métrage (contrairement à Somewhere). La déception a fini par prendre le dessus et le film s'est à mon sens enlisé dans sa propre négativité. Et même si cela est volontaire, j'ai trouvé la manière de retranscrire cette négativité beaucoup moins poétique que dans ses autres réalisations.