Film fleuve sur la guerre de Troie, Troie est un péplum de bonne facture, même si clairement on sent les lacunes d’avoir choisi le parti d’un seul film pour raconter une épopée fleuve, qui aurait mérité une entreprise à la Seigneur des Anneaux.
Niveau casting il y a du lourd. Brad Pitt hérite donc d’Achille, c’est un bon choix d’acteur. Il correspond bien au rôle, et après un début un peu poussif, il se rattrape bien ensuite lorsqu’il débarque à Troie. Efficace, il forme un contraste réussi avec Éric Bana, en Hector. Acteur inégal, capable du meilleur comme du pire, il livre ici une prestation solide, porté il est vrai par le personnage le moins ambigu du film. Orlando Bloom doit s’accommoder d’un Pâris qui en prend pour son grade, c’est le cas de le dire. Il s’en sort bien, mais reste assez fade. Enfin, Peter O’Toole est remarquable en Priam, il n’a rien perdu de ses talents d’acteurs, et chacune de ses apparitions est imposante et charismatique. Pour le reste, on regrettera qu’en dépit de grands acteurs (Diane Kruger, Sean Bean…), le film n’est pu leur offrir une place suffisante. Clairement il aurait au moins fallu un autre film pour développer un minimum les nombreux seconds rôles, intéressants du métrage.
Le scénario est solide. Alors certes il prend des libertés avec le texte originel, mais honnêtement celui-ci était inadaptable sans un minimum de modifications. Il gomme des passages, il s’arrange pour de ne pas perdre Brad Pitt en court de route. Maintenant, l’histoire prend des partis pris qui se respectent, comme celui de vouloir proposer une épopée réaliste, en refusant l’intervention mythologique. On notera, en dépit d’une histoire qui tient en haleine pendant 2 heure 35, ce qui n’est pas rien, une fin un peu bâclé, avec un cheval de Troie qui tombe un peu comme un cheveu sur la soupe, comme si Petersen c’était fait rappeler qu’il se devait de conclure assez vite.
Sur la forme, avec 175 millions on attend forcément du grand spectacle. Petersen livre une mise en scène très convenable, qui donne une certaine majesté à cette épopée. Maintenant, il semble parfois avoir été dépassé par certains enjeux. Ainsi les batailles se veulent tellement gigantesques, que tout fini par devenir terriblement brouillon à l’écran, avec une bataille sous les murs de Troie par exemple qui apparait plus comme un gigantesque foutoir numérique qu’une bataille intense et épique à la Braveheart où à la Gladiator, où même à la Seigneur des Anneaux (le gouffre de Helm étant un chef-d’œuvre de siège). La photographie est de qualité. Elle évite un problème récurrent des films sur l’antiquité, la sépia outrancière. Elle est par ailleurs assez naturelle. Les décors sont un peu justes. J’imaginais une ville de Troie plus impressionnante par exemple. Les effets spéciaux en revanche sont réussis. Le film a déjà presque dix ans, et pourtant il ne souffre pratiquement d’aucunes lacunes sur ce point. Enfin, Troie n’est pas un film sanglant. Clairement il se veut assez grand public, et donc les affrontements sont soft, il ne faut pas s’attendre à du Gladiator ou du 300. La bande son pour sa part est très réussie, bien épique, et dotée d’un thème marquant.
Au final, Troie est un métrage de qualité, qui, malgré sa longueur, est accrocheur et divertissant. S’appuyant sur des personnages solides, et assez originaux pour la plupart, car loin d’être aussi policés que dans d’autres films, il distille intelligemment les scènes d’action, certaines étant très réussies (le combat entre Achille et Hector). Il tombe certes parfois dans le consensuel, il dispose du texte d’Homère à des fins pas toujours légitimes (c’est évident que Brad Pitt devait rester jusqu’au bout, au prix qu’il a du couter !), le final est un peu brouillon, et Petersen a été dépassé par l’immensité des batailles, mais il serait regrettable de bouder son plaisir. Une fresque hollywoodienne qui rappelle un peu la bonne époque des péplums, voilà ce qu’est Troie.