Avec son film Man on Fire, Tony Scott signait, selon moi, ce qui correspond à son plus grand chef-d’œuvre, un film à la fois très émouvant et brutal, porté par des acteurs habités par leur rôle, une mise en scène incroyablement stylisée et une bande-originale mythique. Le Mexique est en proie à une vague d’enlèvements sans précédent. Face à ce danger des familles aisées engagent des gardes du corps pour protéger leurs enfants. C’est dans ce contexte que débarque John Creasy, un ex-agent de la CIA, qui a perdu goût à la vie et trouve son réconfort dans l’alcool. Un de ses amis vient en effet de lui trouver un job à Mexico en tant que garde du corps de la petite Pita Ramos. Peu à peu et au fil des jours, naît une complicité et une amitié forte entre la fillette et le garde du corps désabusé. Mais un jour, Pita est kidnappée et Creasy est violemment blessé. Une fois remis de ses blessures, il apprend que la petite fille est morte et prépare alors sa vengeance contre les ravisseurs. L’heure du jugement a sonnée. Sorti en 2004, Man on Fire fut un petit succès public, rentable il faut le dire, car réussissant à rembourser son budget de 70 millions de dollars mais par contre il ne fut pas tout de suite considéré comme ce qu’il est aujourd’hui à mes yeux, un véritable chef-d’œuvre du cinéma et le meilleur film de Tony Scott. En seulement trois films, et ses meilleurs, tels qu’Ennemi d’Etat, Spy Game : Jeu d’Espions et Man on Fire, Tony Scott aura réussi à imposer un style et une mise en scène très audacieuse avec des scènes d’action remarquables, une image stylée, de superbes plans travelling ou encore des mouvements de caméra divers juste déments. Et après deux remarquables thrillers dans le monde de l’espionnage, Ennemi d’Etat figurant selon moi dans le top des meilleurs films du réalisateur tout comme Spy Game : Jeu d’Espions, Tony Scott s’attaquait donc en 2004 à une adaptation du roman L’Homme de Feu d’A.J. Quinnell qui connut déjà une première adaptation cinématographique sortie en 1987 avec Scott Glenn dans le rôle principal. Man on Fire c’est très simple, c’est une puissante bombe à retardement et quand celle-ci explose elle repend sur l’écran un déchaînement de violence inouïe dans une vendetta destructrice. Le film se divise facilement en deux parties : la première partie se chargeant d’installer le contexte et la relation entre John Creasy et Pita Ramos pour ensuite arriver dans une deuxième partie consacrée à la vengeance du garde du corps qui entraînera tous les ravisseurs de la petite fille dans un voyage aux confins de l’enfer. Le film possède une histoire certes classique mais celle-ci reste prenante de bout en bout, alternant moments d’émotion intenses et scènes d’action furieuses et violentes. Ce qui impressionne tant dans Man on Fire c’est la brillante mise en scène expérimentale de Tony Scott, qui fut encore une vraie claque, deux ans après Spy Game. Nous retrouvons donc de nombreux effets de style comme des ralentis, des arrêts sur image, des scènes accélérées ou des changements de couleurs qui contribuent à faire de Man on Fire un film unique en son genre et inégalable en terme de réalisation. Et notons également l’intelligente utilisation du sous-titrage avec des phrases misent en évidence par différentes polices de caractère et différentes tailles pour faire du film une véritable œuvre expérimentale très ambitieuse sur le plan visuel et c’est une totale réussite. Sans doute le film le plus émouvant de son réalisateur avec de magnifiques scènes d’émotion et une puissante amitié entre un homme qui revit grâce à la présence d’une fillette, Man on Fire est aussi un film d’action intense et sans temps morts, surtout dans sa deuxième partie, où Tony Scott shoote des scènes de rythme explosives et efficaces dont l’impressionnante attaque du convoi du chef de « La Hermandad » où John Creasy, armé d’un lance-rocket, fait exploser une voiture, sort de sa cachette et tir à volonté sur les hommes de main du policier ripoux qui est totalement dépassé par la scène qui se déroule sous ses yeux, sans conteste la meilleure scène d’action du film. N’oublions également pas les terribles scènes de torture, marquantes et barbares, avec celle du personnage de Gonzalez qui perd quelques doigts durant un interrogatoire musclé entre lui et Creasy ainsi que la scène de la « bombe anale » avec le fameux leader de l’Hermandad dans un moment de cinéma forcément mémorable. Tony Scott est souvent critiqué pour ses films d’action qui ne vont pas plus loin que de simples divertissements, et bien depuis Ennemi d’Etat, le réalisateur de Top Gun s’est mué en véritable cinéaste livrant des films de plus en plus audacieux dont l’apothéose stylistique fut atteinte avec l’impressionnant Man on Fire. Ensuite ce qui fait la puissance du film de Tony Scott c’est la formidable bande-originale composée par Harry Gregson-Williams qui s’accompagne de sublimes chansons dont une qui est chantée par Lisa Gerrard, qui est dans la veine de sa mythique chanson Now We Are Free dans Gladiator, réalisé par le frère du réalisateur connu sous le nom de Ridley Scott. Avec des titres électro/techno modernes parfois explosifs, la musique de Man on Fire est juste impressionnante d’originalité et permet au film d’acquérir une ambiance particulière pour permettre à la mise en scène stylisée de Tony Scott et aux quelques scènes mémorables du film de gagner de la puissance aussi bien émotionnelle que brutale. Etant une indéniable réussite à tous les niveaux, le film possède aussi de grandes qualités dans ses dialogues et gratifie le cinéma de quelques répliques cultes comme « Creasy est un artiste de la mort et il s’apprête à accomplir son chef-d’œuvre. », « T’as ton ticket pour l’enfer et crois-moi tu seras bien entouré. » ou encore celle-ci « Le pardon ça se passe entre eux et le tout puissant, moi je me charge de faire les présentations. ». Nous avons là des répliques instantanément cultes qui font très mal lorsqu’on les entend tant elles sont puissantes. Et enfin là où le film emporte totalement l’adhésion du spectateur c’est sur ses acteurs. Porté par un Denzel Washington en pleine puissance dans ce qui est un de ses rôles les plus mémorables de sa carrière, Man on Fire nous apparaît alors encore plus comme un chef-d’œuvre tant le film dépend en partie du jeu de Washington. L’acteur collaborait pour la deuxième fois avec Tony Scott, après U.S.S. Alabama, et le réalisateur lui offrait donc un personnage badass, implacable, violent mais tout en étant émouvant et attachant, bref Denzel Washington fait le film à lui tout seul et est en un mot magistral. Ensuite il y a la jeune et talentueuse Dakota Fanning dans le rôle de Pita Ramos, l’un de ses meilleures rôles au cinéma, Christopher Walken dans le rôle du vieil ami et fidèle Rayburn est parfait, Giancarlo Giannini est lui aussi très bon tout comme le reste du casting composé de Mickey Rourke, Rachel Ticotin, Marc Anthony et Radha Mitchell. Man on Fire est donc pour moi un chef-d’œuvre du cinéma et le meilleur film de son réalisateur qui se distingue donc par sa brillante mise en scène, son histoire prenante jusqu’à sa fin très émouvante, ses acteurs géniaux dont un inoubliable Denzel Washington et ses scènes d’action d’une redoutable efficacité. Afin de résumer parfaitement la grande réussite de ce film, quoi de mieux que de citer l’avis du grand Quentin Tarantino sur ce film ? En effet, le réalisateur de Pulp Fiction et de Django Unchained, qualifie le film de Tony Scott de « Dur, poignant et violent comme l’enfer », une preuve de la grande qualité de ce désormais très grand film qu’est Man on Fire.