Fascination est un film bien connu de Rollin, mais ce n’est à mon sens clairement pas son meilleur. Il mérite la moyenne certes, mais il souffre de réelles lacunes.
D’abord les acteurs. Honnêtement ils ne sont pas à la hauteur, et le problème étant que le film repose largement sur ces-derniers pour exister. Du coup il y a quand même le sentiment d’une grosse entrave de ce point de vue, et ceux qui ne parviendront pas à s’y faire au cours du film auront le sentiment d’assister à une grosse pantalonnade dont tous les effets tomberont à plat. Certes Franca Mai et Brigitte Lahaie sont charmantes, je ne doute pas qu’elles font de leurs mieux, mais en dehors d’un certain charisme à l’écran, leur jeu est piètre. En face Jean-Marie Lemaire n’est guère plus consistant, d’autant que c’est lui qui a le plus à faire. Il est souvent en surjeu et plus d’une fois complètement à coté de la plaque. Quant aux seconds rôles ils sont simplement pathétiques, au moins du niveau du Lac des morts-vivants pour faire le comparatif avec un autre Rollin. A noter par ailleurs que les dialogues sont vraiment débités n’importe comment.
A partir de là on pense se rattraper sur l’histoire. Comme beaucoup de Rollin c’est vrai que c’est un point intéressant. Même si le rythme est lent, voir parfois monocorde, même si toutes les ambitions n’affichent pas à l’écran un résultat très probant, toutefois il faut reconnaitre au réalisateur de réelles audaces. Films à référence, Fascination est souvent intriguant, déconcertant, et il recèle toujours de cette force sensuelle et sensitive qui fait le charme des films de Rollin (enfin certains du moins), et déborde ici vers une ambiance tout à fait prenante. L’exercice de style est réussi, l’histoire se conclue solidement, et malgré un déroulement donc un peu laborieux l’ensemble est agréable.
Niveau réalisation Rollin offre un travail inégal. Curieusement il loupe un peu la phase érotique de son métrage, et se montre souvent trop théâtral dans sa mise en scène, trop démonstratif. Pour autant il y a aussi de bonnes choses. Rollin construit souvent ses plans comme des tableaux, c’est récurrent dans ses films, et ici il y a vraiment des passages fort réussis (le pont bien entendu), et un bon usage des décors. Ces-derniers sont réussis, et ne donnent pas le sentiment d’un film à trop petit budget. C’est un bon point, auquel il convient d’ajouter une photographie certes un peu vieillotte mais qui fait vraiment respirer le film, avec un travail de couleur soigné. En revanche le film loupe ses quelques effets sanglants, et ne dispose pas d’une musique franchement à la hauteur. Quant un film repose autant sur l’atmosphère, une bonne et même très bonne musique et une condition sine qua non à sa réussite pleine et entière. C’est une vraie lacune.
En conclusion Fascination est un film qui se laisse regarder sans déplaisir. Les amateurs de Rollin trouveront leur compte sans nul doute. Il y a de vraies bon points à retenir, mais le souci c’est qu’ils sont souvent inégalement répartis dans le film, qui peine à maintenir un niveau qualitatif constant, et qu’ils affrontent la concurrence de défauts particulièrement prégnants. Le jeu des acteurs, souvent approximatif chez Rollin, peine malheureusement ici à faire oublier sa médiocrité générale, et comme le film s’apparente quasiment à une pièce de théâtre (à tout les niveaux, avec une unité de temps, lieu et action typique de la scène), comme pour le spectateur qui va voir une pièce, si le jeu est mauvais difficile de vraiment estimer le reste à sa juste valeur. Ajoutons à cela une mise en scène inégale, une musique plus que faillible, des effets visuels totalement dépassés, sans oublier une histoire qui ne nous transporte pas non plus vers des sommets, et je donne la moyenne. Cela en tenant compte d’une belle atmosphère, de décors réussis, d’une photographie fraiche, d’une belle ambition générale et d’un budget dérisoire.