Suite au «Chien andalou» (France, 1928), le surréalisme saffiche et dérange, différemment, dans «LÂge dor» (France, 1930) de Luis Bunuel. Là où le premier court-métrage dérangeait par son illogique narration et par la folie onirique de son contenu, «LÂge dor» (France, 1930) possède une histoire plus réelle, tout en étant à des milliers dannées lumières du réalisme. Grosso modo, cest lhistoire dun homme (Gaston Modot) qui a pour mission de venir au secours denfants, de femmes innocentes et de pauvres vieillards. Lhomme semble donc incarné le modèle type du héros, à la rescousse de la pauvre et de lorphelin. Mais lironie grinçante de Bunuel, ironie qui ne retrouvera son mordant efficace quavec «La Voie lactée» (France-Italie, 1969) et «Cet obscur objet du désir» (France-Italie, 1977), fera croiser au présumé héros le chemin de la folie passionnelle. Lironie pèse tout le long du film, elle pèse tellement quelle est le négatif de la légèreté que dégage loeuvre. Sommes de barbarie : meurtre sauvage dun enfant comme un vulgaire canard, violence gratuite sur un aveugle inoffensif et une bourgeoise servile, etc
Bunuel ri de cette gravité, il en ri pour ne jamais en pleurer car ici lart nest pas dans sa valeur illustrative, elle y est expérience avant de devenir politique pour «Terre sans pain» (France, 1932). Heureusement le film, bardé de surréalisme, grâce à une causalité des plus démunis de logique, naffiche jamais dirresponsabilité. «LÂge dor» lest peut-être du cinéma artistique. Le plan final de «LÂge dor» tout aussi étrange que le reste laisse une ouverture immense vers luvre bunuelienne. «LÂge dor» et «Un chien andalou» se révèlent a posteriori les immenses introductions de luvre de Luis Bunuel.