Aaah "Le dernier samouraï"… J’avais oublié combien c’est un joli film. Un film digne (ou presque) de figurer parmi les plus grandes fresques hollywoodiennes. Parce que c’est là un des meilleurs films d’Edward Zwick, lui qui revint à cette occasion aux affaires après huit années de traversée du désert, alors qu’il semblait être promis au cercle fermé des plus grands réalisateurs après avoir signé de belles œuvres avec le méconnu "Glory" et le merveilleux "Légendes d’automne". Qu’à cela ne tienne, Edward Zwick nous prouve ici qu’il a un réel savoir-faire. D’abord par de jolis ralentis, pour certains stylisés afin de les identifier clairement en flashbacks. Ensuite parce qu’il n’a pas son pareil pour nous faire découvrir le charme des villages du Japon profond, la beauté des jardins. Ces villages reculés où règnent le respect mutuel. Outre le fait que la spiritualité ressort de la quiétude de ce village comme la transpiration au soleil, Zwick a su capter la philosophie de ces habitants qui « dès leur réveil, […] se concentrent entièrement sur la perfection de ce qu’ils réalisent ». Alors certes, tout cela est très romancé, et la musique de Hans Zimmer n’y est pas étrangère tant celui-ci a su marier les notes orientales avec les notes occidentales. On pourra rechigner sur l’aspect romancé, mais il faut avouer que cela offre bien des avantages. Par exemple, ça a le don de sublimer les images, comme dans toutes les fresques en général. Encore faut-il être capable de capter la beauté des paysages, ou de mettre en valeur les personnages. Et le cinéaste en a été capable, et même mieux que ça. Le fait est que la sensibilité et la sensualité de Taka n’en sont que mieux saisies. Cela dit, rien n’aurait été possible sans la sublime interprétation de son interprète Katô Koyuki, pourtant peu bavarde. Ah ben tiens en parlant des acteurs, on doit saluer également la performance de Ken Watanabe dans la peau de Katsumoto. Habité littéralement par son personnage, il a été capable d’afficher un double visage, en ayant celui du terrible guerrier et celui de la compassion et de la bonté même. Faut-il revenir sur celui qu’on ne présente plus ? Une fois de plus, Tom Cruise rend une copie parfaite. Les certitudes, la rage, la force, le courage qui animent son personnage, et la dévotion qu’il met au service de la mission qui lui est confiée forcent l’admiration tant il parvient à les retranscrire. Si tout le monde pouvait en faire autant et aller au bout des choses… Dans le cas qui nous intéresse, c’est ce qui va lier les deux personnages principaux. Edward Zwick a justement su matérialiser cela, avec ce joli parallèle entre Katsumoto et la prise de conscience d’Algren (Tom Cruise), exactement comme si leur esprit était étroitement lié et même au-delà. C’est la résultante même d’un périple aux faux airs de pèlerinage, au cours duquel la remise en question, le chamboulement de toutes les certitudes et la chute de tous les préjugés sont pour ainsi dire inévitables et souvent synonymes de rédemption. Là aussi, Tom Cruise a su parfaitement les retranscrire. Dans tous les cas, "Le dernier samouraï" a été tourné selon un certain mode opératoire : celui du livre autobiographique historique. Et il existe selon mois trois raisons pour que j’ose avancer une telle affirmation. 1/ Il n’y a qu’à voir comment sont filmés les chevaux, en particulier lors de la bataille finale. Le démarrage des équins, puis le ralenti. Au point qu’on pense voir l’image s’arrêter. Eh bien non, mais le ralenti est suffisamment appuyé pour laisser entrevoir au spectateur des images de livres d’Histoire. Et puis hop ! ça repasse en vitesse réelle. 2/ La référence faite à la bataille des Thermopyles, véritable fait historique que Zack Snyder s’appropriera bien plus tard (2007). 3/ La narration en voix off au tout début du film. Une narration qu’il convient d’écouter avec attention car elle donne le fil conducteur de ce film, à savoir l’honneur. Alors oui, pour moi c’est un grand film, même si la fiction se retrouve mêlée à la réalité. Je vous laisse le soin de découvrir les détails dans les secrets de tournage de notre cher site Allociné, mais APRES avoir vu le film. Ben oui, sinon vous saurez grosso modo comment tout cela va se terminer (ce serait dommage, surtout si vous ne connaissez pas ce pan de l’Histoire), encore que le titre laisse entrevoir le fait que de ces samouraïs il n’en restera qu’un. Mais bon. Il est à noter toutefois qu’on a tout de même un peu d’humour. Et ça commence par la conversation à sens unique qu’Algren entretient avec celui qu’il a nommé Bob. Dans tous les cas, on nous offre aussi à nous spectateurs, outre le choc des cultures entre l’Occident et l’extrême Orient, une opposition saisissante entre le Japon qui se veut moderne et le Japon qui veut conserver envers et contre tout ses traditions. L’internaute cinéphile Marc Guiot a eu raison de souligner cet aspect-là, ainsi que le fait que la zen attitude nous gagne malgré le cadre et les enjeux de l’histoire. Car indéniablement, un certain nombre d’entre vous se dira qu’en ces villages reculés, il devait sûrement faire bon vivre en ce temps-là…