"Larmes de joie" de Mario Monicelli, était totalement inconnu, car jamais sorti en France. C'est la fameuse comédie italienne dans toute sa splendeur : une petite figurante de péplum, Tourterelle (Anna Magnani), et un acteur raté qui survit de petites escroqueries à l'assurance, Umberto, (Totò, le Buster Keaton italien), se retrouvent dans la nuit romaine de la Saint-Sylvestre, où ils sont associés pour leur malheur à un pickpocket, Lello (Ben Gazzara, oui, celui qui deviendra l'acteur fétiche de Cassavetes). Les péripéties, d'après une nouvelle de Moravia, font osciller le film entre de purs moments de comédie (les fêtards qui cherchent désespérément une quatorzième personne pour leur table, afin de n'être pas treize à table) et une chronique à la Chaplin de la misère humaine et sociale. Car tout va rater magnifiquement, si on peut dire, Tourterelle n'ayant pas été mise au courant des magouilles miteuses où Lello et Umberto l'entraînent malgré elle, et c'est elle qui fera tout échouer. L'art de la comédie italienne (comme chez Molière) est que les auteurs aiment leurs personnages, en particulier Monicelli, un habitué des héros pitoyables (revoir "Le pigeon", ou "La Grande Guerre", plus tard les deux "Brancaleone" ou "Mes chers amis"). L'illusion nocturne ponctuée de rêves improbables va se dissiper au petit jour, comme dans "Les lumières de la ville" de Chaplin.