Il ne faut ici pas s’attendre à un western traditionnel. Si l’action se déroule dans de superbes grands espaces parfaitement filmés (comme, la même année, dans « La Dernière caravane »), l’intrigue relève davantage du film noir et du drame. Intelligemment ficelée, celle-ci pose les ingrédients qui entraîneront fatalement une tragédie. En accordant une attention à l’ensemble de ses personnages qui portent en eux des fêlures qui, peu à peu, se font jour, on évite le récit caricatural et les antagonismes de circonstance.
Le film peut, en outre, s’appuyer sur un casting quatre étoiles. Comme à son habitude, Glenn Ford est parfait dans son rôle de brave gars pris dans une tourmente qu’il n’a pas cherché à déclencher. Ernest Borgnigne, en bon mec naïf qui pète les plombs, est attendrissant. Rod Steiger reste un éternel parfait salopard. Si elles sont certainement trop caricaturales, les deux femmes de l’histoire, la garce et la prude, font le job. Et on a le plaisir de croiser Charles Bronson et Jack Elam dans de petits rôles. Ce casting rappelle bien qu’on est dans un film de personnages et que la psychologie des uns et des autres prédomine sur tout le reste. Les amateurs d’action seront sûrement déçus tant elle est ici presque anecdotique. Même le final demeure très sage.
La tension, en revanche, qui, peu à peu, s’installe, est parfaitement mise en musique et, bon signe, on se demande souvent d’où les premiers coups vont pleuvoir et quels sont les personnages qui vont trinquer. Le résultat, s’il n’atteint pas d’autres grandes réussites de Delmer Daves, donne cependant un film très agréable et intelligent. S’il manque certainement de vrais moments forts pour emporter totalement le morceau et si l’ensemble verse parfois un peu trop dans le ton mélodramatique, certaines situations sont remarquablement amenées et plusieurs scènes valent le détour.