Si Only the Lonely intrigue jusqu’au bout, c’est surtout en raison d’une impression de fantastique qui contamine la relation entre une mère et son fils, nous laissant dubitatifs face à des visions prémonitoires dont nous ne comprenons d’abord par l’origine : s’agit-il du parent qui jette des sorts à son enfant pour qu’il reste auprès de lui, ou de l’enfant qui culpabilise à l’idée de le laisser seul ? Aussi, lorsque la réponse est apportée, nous sommes un peu déçus. Heureusement qu’entre-temps, nous ayons pu nous attacher aux personnages, notamment à ce couple principal qui doit affirmer son amour contre vents et marées, ainsi qu’à celui, en miroir, formé par le voisin séducteur avec la mère, soit Anthony Quinn Maureen et O’Hara, couple iconique de l’histoire du cinéma – uni par une passion amoureuse à la ville, comme l’écrira l’acteur dans son autobiographie – avec The Black Swan (Henry King, 1942), Sinbad the Sailor (Richard Wallace, 1947) et The Magnificent Matardor (Budd Boetticher, 1955). Il est assez touchant d’assister à la rencontre de deux générations du septième art, au choc de deux univers : l’un défini par l’épique, le grand drame hollywoodien et le western (O’Hara et Quinn), l’autre par la comédie des années 80 (Ally Sheedy de The Breakfast Club sorti en 1985 et John Candy de Planes, Trains and Automobiles en 1987, deux films réalisés par John Hughes, ici producteur). La mise en scène de Chris Columbus soigne ses mouvements de caméra et le cadrage de ses plans, sans pour autant proposer de fulgurances ou de partis pris personnels. La chanson de Roy Orbison ouvre le long métrage et indique d’emblée le thème général, celui de la solitude qui terrifie les êtres au point de convertir leur amour en une puissance négative et destructrice. Only the Lonely s’affirme alors comme un drame certes prévisible et classique, mais bien exécuté, bien interprété et doté d’une souffrance interne singulière.