La réalisatrice Marceline Loridan-Ivens, veuve du cinéaste Joris Ivens, a vécu l'enfer des camps de concentration allemands de 1943 à 1945. Avec La Petite prairie aux bouleaux, elle signe un film en forme de devoir de mémoire. "J'ai réalisé ce film parce qu' à 75 ans j'entame la dernière étape de ma vie et que tous ceux qui, comme moi, sont revenus des camps, disparaissent les uns après les autres", déclare-t-elle. " Il faut parler avant que la Shoah ne soit bientôt étudiée dans les écoles comme un épiphénomène, une convulsion de l'Histoire, traités tels la Guerre de Cent ans ou le massacre de la Saint Barthélémy aujourd'hui."
Pour la réalisatrice Marceline Loridan-Ivens, "on occulte le fait que chaque déporté était un individu, avec son expérience, son vécu, sa sensibilité, sa personnalité. Aujourd'hui, chaque survivant a ses souvenirs, ses douleurs de cette époque qui l'ont marqué dans sa chair et son esprit. Il partage avec les autres survivants d'avoir vécu la même tragédie, mais chacun, en fonction de ce qu'il était et de ce qu'il est devenu, a des émotions personnelles qui échappent aux classifications d'ensembles et qu'il ne peut pas dire. Il était important de transmettre par le cinéma - parce que c'est mon métier - ce qui, justement, ne peut pas être dit. Le transmettre différemment."
Le rôle de Myriam, une rescapée du camp de Birkenau qui revient sur les lieux de l'enfer cinquante après, est tenu par la comédienne Anouk Aimée. Juive, la Française a naturellement été très touchée par l'histoire de La Petite prairie aux bouleaux. "Ce que j'ai voulu faire passer dans Myriam, c'est le courage et la détermination de cette femme qui revient sur les lieux où elle a vécu l'enfer", explique-t-elle. "C'est un acte délibéré et elle sait que la confrontation sera violente. Mais elle ne peut continuer à vivre si elle ne vient pas se frotter, se heurter à ses souvenirs. Cette force m'a fascinée. J'ai aussi aimé qu'on ne montre pas ce qu'a été le camp. L'histoire se passe au présent. Le film ne fait aucun retour historique sur l'horreur de Birkenau et laisse à Myriam le soin de donner à imaginer ce qu'elle a vécu."