Les périodes de crise sont toujours une source inépuisable d'inspiration pour les metteurs en scène... pour peu qu'ils soient un tantinet talentueux. En l'occurence, Hitchcock avait, à son époque, accouché du sublime "Vertigo", Ozon, lui, a donné naissance à "Swimming Pool". Et on l'en remercie ! Couché sur papier après le tournage vivement éprouvant de "8 Femmes" qui, dixit son auteur "[lui] avait fait perdre l'envie de faire des films !", "Swimming Pool" est probablement le film le plus complexe, le plus cérébral et le plus fascinant de François Ozon à ce jour.
En portraiturant Sarah Morton (interprétée par Charlotte Rampling), une auteure de thrillers en quête d'une existence plus débridée et accessoirement en mal d'inspiration, le réalisateur met en image avec une maestria sidérante une atmosphère plongée entre deux eaux, celles de la réalité et de la fiction, qui s'entremêlent dangereusement dès lors que la protagoniste se retrouve confrontée au personnage de Julie (Ludivine Sagnier), projection révélatrice de toutes ses pulsions refoulées, frustrations et fantasmes en tout genre.
Cette thématique du double fantasmatique (qui verra les deux figures féminines se croiser, s'apprivoiser, se mélanger, se remplacer, s'entrechoquer pour ne plus faire qu'une seule) est tout simplement captivante. La piscine se pose, au milieu de tout ceci, comme le lieu où se cristallisent ces fluctuations incessantes entre les deux personnages. Sa surface est tout aussi claire que les tréfonds de l'imagination de l'auteure sombres et tourmentés.
Avec son plan final qui hante longtemps après le générique de fin, l'intriguant "Swimming Pool" se clôt sur un "peut-être...", sur une profusion de "et si...", sur des questionnements non élucidés qui permettent au film de livrer, à chaque nouveau visionnage, un regard neuf tout aussi déconcerté... et déconcertant.
En un mot : envoûtant.