La Fleur du Mal : les secrets du tournage

Pas moins de cinq des membres de la famille Chabrol ont travaillé sur La Fleur du mal. En plus de Claude au scénario et à la mise en scène, on trouve Aurore, sa femme, comme scripte, de deux de ses fils et sa belle-fille. Thomas est un des principaux interprètes du film tandis que Matthieu en a signé la musique. Sa belle-fille Cecile Maistre assiste Claude Chabrol à la mise en scène.

Des principaux interprètes de La Fleur du mal, seul Thomas Chabrol a déjà tourné avec le réalisateur. Pour Nathalie Baye, Benoît Magimel, Suzanne Flon, Bernard Le Coq et Mélanie Doutey, le film marque leur premiers pas devant la caméra de Claude Chabrol.

Par contre, certains des comédiens avaient déjà tourné ensemble. Suzanne Flon et Nathalie Baye étaient au casting d'En toute innocence (1988). La première tourne en 2003 Effroyables jardins avec Benoît Magimel. Ce dernier a déjà partagé l'affiche de Selon Matthieu de Xavier Beauvois avec Nathalie Baye.

Au coeur de La fleur du mal se trouve une histoire de campagne politique. Nathalie Baye joue en effet le rôle d'une candidate à l'éléction municipale de sa commune. Pour son personnage et celui de son conseiller, Claude Chabrol a tenu que la comédienne et son fils prennent pour modèle des personnages politiques existants sans préciser lesquels. Thomas Chabrol confie tout de même que, depuis le tournage, "trois de ses sources d'inspiration sont entrées au gouvernement."

Nathalie Baye explicite sa conception de son personnage, Anne Charpin-Vasseur : "C'est d'abord une grande bourgeoise, qui a une vie bien établie et qui s'est lancée dans la politique. La suractivité l'aide à ne pas trop penser, à fuir la réalité en quelque sorte. Elle est en permanence dans l'action pour ne pas tomber. Elle a un côté très rigide, le paraître est fondamental pour elle."

Claude Chabrol explique sa conception du personnage de Gérard Vasseur interprété par Bernard Le Coq : "C'est pour moi le cas typique et très fréquent de la personne qui appartient à un milieu et qui n'arrive pas à s'y faire accepter avec ces caractéristiques intrinsèques. C'est la pièce rapportée. Il est toujours un tout petit peu à côté... Grâce à l'interprétation de Bernard Le Coq, il finit par devenir presque un peu pathétique..."

Depuis quelques films, Claude Chabrol a davantage cherché à prendre pour personnages principaux de jeunes acteurs. C'était notamment le cas dans Merci pour le chocolat à travers les rôles d'Anna Mouglalis et Rodolphe Pauly. Le cinéaste s'en explique : "Il y a toujours eu des jeunes dans mes films mais avec des rôles assez secondaires. De plus en plus, je trouve intéressant de raconter des histoires de jeunes qui évoluent dans un milieu "vieux" chargé de passé..."

La Fleur du mal est le cinquantième long métrage de Claude Chabrol. Le cinéaste y retrouve un de ses genres de prédilection, la satire de la bourgeoisie provinciale : "J'avais déjà tourné Docteur Popaul près de Bordeaux... J'ai choisi d'y revenir parce que je voulais raconter une histoire de famille et les familles qui se perpétuent ne sont pas rares par ici. Et puis, le père de Tante Line, Pierre Charpin, devait faire immédiatement penser à un haut dignitaire de la région qui a beaucoup défrayé la chronique ces derniers temps..."

Dans La Fleur du mal, les scénaristes ont voulu réfléchir à l'évolution de la bourgeoisie sur plusieurs générations. Ils sont arrivés à cette conclusion : "Le temps n'existe pas. C'est un présent perpétuel." Caroline Eliacheff explique ainsi : "Parce que les personnages sont beaux, sympathiques, intéressants, le propos sur la bourgeoisie n'en est que plus cruel. Ils sont d'une effrayante normalité. S'il n'y avait pas de crime, peut-être n'y aurait-il rien à raconter puisque rien ne change. Jamais..."

La Fleur du mal met en scène ce qui reste de trois générations de la famille Charpin-Vasseur appartenant à la bourgeoisie bordelaise. Ses personnages se partagent trois types de lieux : les maisons familiales, ceux qui concernent la campagne électorale et la pharmacie-laboratoire. L'action se déroule en cercles concentriques. Elle conduit les personnages dans ces différents lieux mais ils reviennent toujours - tous- à la maison familiale.Pour créer le suspense, Claude Chabrol a également élaboré trois pistes : la campagne électorale, le tract dénonciateur et les crimes passés qui ressurgissent.

La décoratrice Françoise Benoît-Fresco parle de son travail sur la maison familiale : "Toute la difficulté a été de travailler sur les deux époques, sur l'idée que le temps passe et rien ne change. Pour les séquences censées se dérouler en 1944, mobilier, peintures et tissus sont assez prétentieux, signe d'une richesse et d'un statut social, et en même temps déjà un peu fanés. En changeant d'époque, nous retrouvons un style plus raffiné, plus élégant, typique de la bourgeoisie de province d'aujourd'hui. Finalement cela bouge très peu... On peut imaginer qu'Anne Charpin-Vasseur (Nathalie Baye), en arrivant dans la maison, a imposé son goût dans certaines pièces mais cela reste toujours la maison de tante Line (Suzanne Flon) ..."

La Fleur du mal marque la douzième collaboration de Claude Chabrol et de son producteur Marin Karmitz. Les deux hommes ont commencé à travailler en 1985 sur Poulet au vinaigre. Depuis lors, les seuls films mis en scène par Chabrol et produits par un autre sont Le Cri du hibou (1987), Jours tranquilles à Clichy (1990), Dr M. (1990) et L'Oeil de Vichy (1993).

Grand fan de l'émission de télé Le Juste où prix où le public doit essayer de retrouver les prix exacts d'objets plus ou moins importants, Claude Chabrol a fait demandé à une des principales hôtesses du jeu, Dominique Pivain, de tenir un rôle secondaire dans La Fleur du mal. Elle joue le rôle d'une célèbrité qui se déplace dans la localité où vivent les Vasseur où elle fait la connaissance de Gérard qui essaie de la séduire.

Pour La Fleur du mal, Claude Chabrol a fait appel à des collaborateurs avec qui il avait déjà travaillé. La scénariste Caroline Eliacheff a co-écrit La Cérémonie (1995) et Merci pour le chocolat (2000). Le directeur de photographie Eduardo Serra a travaillé sur Rien ne va plus (1997) et Au coeur du mensonge (1999). Matthieu Chabrol a déjà composé la musique de quatorze autres films de son père parmi lesquels Les Fantômes du chapelier (1982), Le Cri du hibou (1987), Madame Bovary (1991) et L' Enfer (1994). Quant à la monteuse Monique Fardoulis, elle a collaboré à plus de vingt films de Chabrol depuis Marie-Chantal contre docteur Kha en 1965.