Je suis en colère. Oui, je suis en colère parce qu’en dépit du fait que "Le jour d’après" soit diffusé en cette soirée du dimanche 26 janvier 2020, je considère que ce film devrait être diffusé plus souvent qu’il ne l’est. En effet, il parle d’un sujet de plus en plus préoccupant, celui du changement climatique. Bien avant de s’occuper du terme du calendrier maya synonyme de fin du monde selon certains théoriciens, voilà que Roland Emmerich se penche sur la question environnementale tel un chevalier venu au secours des scientifiques que les politiciens n’écoutent pas. Et il condamne. Il condamne la mise dans les tiroirs des prévisions pessimistes, restées pour ainsi dire lettres mortes. Il condamne les enjeux financiers et économiques malgré le désastre annoncé si rien n'est fait rapidement. Vous savez, ces enjeux qui rendent l’accord de Kyoto totalement inutile. Sans doute le cinéaste a considéré qu’il était anormal que les scientifiques crient à corps et à cris dans le vide. Alors quoi de mieux que le cinéma pour informer, alerter, mettre en garde ? Qu’on aime ou pas ce réalisateur, on doit lui reconnaître cette volonté de porter plus haut le chiffon rouge agité par les climatologues. On le connaît pour ses films à grand spectacle, et bien souvent le spectateur avide de scènes spectaculaires est servi. Mais on le connaît aussi pour avoir cette capacité à exagérer, et de passer par quelques incohérences. Eh bien il est fidèle à sa réputation. Après un générique de début nous faisant découvrir toute la beauté immaculée de l’Antarctique, Emmerich cueille le spectateur à froid (si j’ose dire) par l’arrivée rapide d’une scène spectaculaire avec une belle prise de vue vertigineuse. Oui, les images sont parfois impressionnantes (la faille, le raz-de-marée…), à la fois effrayantes et si belles par la démonstration de force de Dame Nature. On a droit aussi à quelques belles images, comme lors du générique ou de couchers (ou levers) de soleil. Vous l’aurez compris, les images les plus simples et les effets spéciaux nous en mettent plein la vue, ces derniers spectaculaires à souhait quand le raz-de-marée est filmé à la verticale : cela permet de prendre la mesure du désastre. Et encore, ça reste malgré tout assez inimaginable, dans le sens qu’il faut le vivre pour parvenir à se rendre compte de ce genre de truc. Bon, j’entends dire certains que la théorie relayée par Emmerich est fantaisiste. C’est vrai quoi : on parle de réchauffement climatique et on irait vers une période glaciaire ? Allons allons, a priori ça ne tient pas debout ! Eh bien au risque de vous déplaire et de perdre là un certain nombre de mes lecteurs, moi j’y crois à cette théorie. D’abord parce qu’elle existe, ensuite parce qu’elle me semble logique. Il suffit d’y réfléchir deux secondes : après tout, notre bonne vieille planète a toujours fait ce qu’il faut pour maintenir ou retrouver son équilibre, sinon il y a belle lurette que la vie aurait disparu. Et puis il n’y a qu’à observer l’actualité : la Terre se rebiffe et fait toujours plus de dégâts ! Dans tous les cas on doit admettre que le cinéaste s’est bien documenté pour lancer cet énième avertissement, seulement entendu par un million de français, ce que je considère comme étant nettement insuffisant. A vrai dire, moi non plus je n’ai pas été voir ce film au cinéma, l’emploi du temps ne m’en ayant pas laissé l’occasion. Pourtant, ça en valait la chandelle, ne serait-ce que pour le spectacle. Mais si je peux dire que le cinéaste s’est bien documenté, c’est par la présentation (certes rapide) de cette toile d’araignée tissée par la science pour surveiller notre Mère en tout point du globe. Et si j’ose encore affirmer qu’il s’est bien documenté, ce n’est pas seulement pour cette théorie ; c’est aussi par les signes donnés par les animaux, en particulier les oiseaux dont le déplacement en grande masse ne laisse présager rien de bon. Et puis il y a cette montée des eaux, un phénomène attendu et agité tel un spectre devant lequel seules quelques personnes semblent s’inquiéter. Cependant je crois que Roland s’est laissé aller une nouvelle fois à une trop grande exagération : le fait qu’il puisse y avoir plusieurs tornades côte à côte me semble un peu fort de café. Le refroidissement brutal également, ainsi que le court délai du changement climatique. Mais ne fallait-il pas ça pour interpeller de manière définitive ? Moi je pense que si : autant établir un scénario catastrophe pour provoquer une prise de conscience générale. Seulement Emmerich n’y a pas été avec le dos de la cuillère, alors l’effet escompté n’a malheureusement pas eu lieu. La preuve aujourd’hui, seules quelques petites mesurettes sont prises, en aucun cas consécutives au film. C’est déjà ça me direz-vous, mais c’est loin, trèèèèèèèès loin d’être suffisant.
Si l’effet escompté n’a pas été atteint, c’est aussi à cause de quelques incohérences, matérialisées par un piolet. D’abord je suis surpris par la vitesse à laquelle le climatologue dégaine son piolet dans la faille. Ensuite, lors de son opération de sauvetage à l’échelle de petit être humain insignifiant, il le plante où son piolet lorsqu’un de ses collègues dévisse ? Mmmm ? Ils sont sur une verrière, non ? OoO !!! A cela on rajoute des actes de sacrifice, de bravoure, voire d’héroïsme, et même de morale ! Un vrai film américain, quoi. Mais un film américain qui se respecte en tant que tel. En même temps, c’est du Roland Emmerich, auteur d’un cinéma pas toujours très fin mais souvent efficace point de vue spectacle. On sent tout de même son entière implication sur ce sujet qui concerne la terre entière. Non seulement il condamne comme je le disais plus haut, mais il tombe aussi dans les clichés, comme ces foutues conventions auxquelles on peut s’accrocher de toutes nos forces alors que le caractère d’urgence se fait sentir (l’interdiction d’entrée aux chiens), les gens qui sont bien longs à la comprenette (voilà la flicaille égratignée au passage alors que deux personnes essaient de sortir du taxi piégé), ou encore comme les gens qui ne pensent qu’à leur gueule (le chauffeur de bus). On n’échappe pas non plus à la morale finale présentée sous forme d’un mea culpa. Dans tous les cas, les acteurs font parfaitement le boulot. Que ce soit Kenneth Welsh en vice-Président qu’on détestera rapidement, ou que ce soient les compagnons de Jake Gyllenhaal que sont Emmy Rossum et Arjay Smith (respectivement dans la peau de Laura et Brian). Si je n’ai pas trouvé Jake si formidable que ça en garçon blasé de tout (ou presque), j’ai trouvé une anecdote un peu marrante à propos de Dennis Quaid : en 1987, lors de "L’aventure intérieure", il avait littéralement « habité » un dénommé Jack, lequel repartait sur les chapeaux de roues en fin de film en disant… « Jack à la rescousse ! ». Cette fois, Dennis Quaid est Jack, mais pas le même Jack hein, ça n’a rien à voir. Allez savoir pourquoi je me suis souvenu de ça… Ça n’a aucun rapport !!! Bref passons. J’ai tout de même apprécié Sela Ward (qu’on a davantage vu dans la série "Les experts : Manhattan") en Dr Lucy Hall parce qu’elle amène un peu d’émotion mais surtout parce qu’elle incarne à la perfection l’engagement total dans le sacerdoce qu’elle a choisi de servir tel un capitaine qui coule avec son navire. Mais le personnage que j’ai préféré, c’est Luther, le SDF incarné avec beaucoup de réalisme par Glenn Plummer. C’est pourtant un personnage de second plan, voire de troisième, mais c’est ainsi. Moi-même ignore pourquoi ma préférence va vers lui. Dans tous les cas, il est fort possible qu’un frisson vous parcoure le corps à la fin du film. Non pas à cause d’une histoire à faire froid dans le dos quand on voit ce qui nous attend possiblement, mais certainement en raison du fait d’être plongé dans une ambiance glaciale durant deux heures.
Après, nous sommes d’accord, ce film n’a pas grand-chose de scientifique, si ce n’est l’exposition de cette théorie. Non ça reste une fiction parce que quand les scientifiques parlent d’un changement brutal de climat, c’est sur plusieurs années (cinq, dix, quinze ans, qui sait vraiment ?). Mais le staff a pris le parti d’un grand spectacle visant à éclairer le public sur un problème qui concerne tout le monde. La raison de ce parti en revient à la difficulté de faire le tour de la question en deux heures à peine.
Maintenant, à chacun de se faire son propre avis là-dessus…