D'abord entre les mains de John Huston, Le Criminel échoue finalement dans celles d'Orson Welles qui, à la base, ne devait en être qu'un des acteurs. Ce film était aussi un défi pour lui, alors qu'il était encore en odeur de sainteté avec Hollywood (avant que ça ne se gâte sérieusement), il accepte de réaliser le film et en même temps, prouver qu'il était capable de terminer un film à temps et ce, sans dépassement de budget. Mais Hollywood a toujours été impitoyable et Le Criminel fut quand même coupé de plusieurs scènes, ce qui poussa Welles a renier le film.
J'aurais finalement attendu ma sixième expérience avec son cinéma pour être déçu et c'est d'autant plus dommage que j'en attendais beaucoup, déjà par le nom de Welles derrière la caméra (ainsi que son casting et Huston au scénario), puis mon amour pour le film noir de l'âge d'or Hollywoodien et enfin par son sujet. Ici, il nous emmène peu de temps après la fin de la Seconde Guerre mondiale pour nous faire suivre un ancien chef de camp nazi qui vit sous une nouvelle identité aux USA. Malheureusement, Welles ne retranscrit pas vraiment la noirceur, ni la tension qui aurait été adéquate au récit.
Pourtant le début commence bien, c'est assez intriguant mais le mystère s'évapore peu à peu et l'écriture est assez maladroite, que ce soit dans certains personnages ou dans divers ressorts scénaristiques. Welles ne semble d'ailleurs pas toujours bien le maîtriser et signe une mise en scène assez anodine, sans génie et manquant même cruellement de tension, et d'angoisse à l'exception d'un regain lors de la dernière partie. Finalement le film contient plusieurs temps morts, notamment en milieu de récit tant l'atmosphère est absente, rajouté à cela quelques interprétations tombants par moments dans un sur-jeu de mauvais goûts et ça devient bien difficile de trouver quelques qualités et/ou points forts à Le Criminel.
Et pourtant, l'ensemble n'est pas non plus déplaisant à suivre, notamment grâce à son début et sa fin, de plus Welles montre, certes par intermittence, qu'il est bien un grand cinéaste comme peut en témoigner la façon dont il met en scène l'inévitable chute du personnage principal et comment il va, peu à peu, perdre ses moyens et assurances. De plus, il ne manque pas de quelques bonnes idées par-ci par-là tel le coup de l'horloge. À noter aussi que c'est le premier film mettant en images les morts des juifs dans les camps, et ce à travers un passage du documentaire Death Milles de Billy Wilder.
Finalement c'est bien déçu que je ressors de la vision de ce Orson Welles, manquant notamment de tension, noirceur et finalement d'intérêt et ce, malgré un sujet prometteur et quelques bonnes idées.