Au Hasard Batlhazar est une oeuvre filmée d'une manière incroyable qui ne rends pas ce qui est filmé incroyable. De ce fait, il donne l'impression d'être abouti techniquement et artistiquement sans cependant être passionnant. Un sentiment de frustration apparaît car l'on n'a pu goûter à la grande sensation promise. Celle-ci semble s'être échappée par une troisième voie voyant que celle de l'impeccable technique qui aurait pu mener à l'atteindre allait s'allier à celle de la volonté du réalisateur qui ne pouvait mener à l'éclosion.
En fin de compte, le film tends à démontrer que la beauté se suffit à elle-même, et qu'il ne sert à rien de la compliquer ou de faire monter le ton pour atteindre la grandeur. Malheureusement, quand des acteurs parlent comme s'ils récitaient pour s'exprimer, pour ma part, je ne ressens aucune puissance, et je ne suis pas touché. Parce-qu'il n'y a rien d'incroyable ici. Certes, quelques fois, des visages seront rendus sublimes, mais la plupart du temps, les images sont très belles, et ce qu'elles contiennent n'est pas laid mais n'est pas non plus incroyable. Et tout ce qui est le plus commun possible est le plus inintéressant, à moins que ce commun soit montré comme comme hors du commun mais ce n'est pas le cas ici, à de rares exceptions près. « Un film ne peut jamais être le reflet de la vie. Un film est une sorte de vie particulière existant quelque part entre Dieu et l'homme. » a dit Sokourov. Ainsi, si dans les films de ce-dernier il ne se passe pas forcément des choses qui sortent vraiment de l'ordinaire, il arrive cependant à rendre ce qu'il filme comme particulier et puissant, à travers une imagerie unique, son univers dépassant l'entendement. Ici, Robert Bresson peine à sortir toute chose de sa banalité.
Le réalisateur n'est cependant pas un tâcheron et sait faire défiler une mécanique qui crée une efficacité. Et en soit, on n'en ressors pas avec une mauvaise impression.
Pourtant, autant dire que je ne garderai rien de ces personnages qui n'ont pas grand chose pour eux, ils restent cloisonnés dans leur simplicité et autant dire que je m'en fiche d'eux, et je ne garderai pas grand chose du reste, très bien filmé, mais banal.
Au final, je trouve que les films repoussant toute limites sont bien plus intéressants que ceux qui se donnent celles de la banalité sous prétexte qu'il n'y a rien de plus beau que le vrai. Pour moi, au cinéma, rien ne doit avoir de limites.
Au Hasard Balthazar est un film correct, mais de par ces barrières derrière lesquels il s'est retranché, s'est empêché toute possibilité pour lui de faire jaillir des éclats.