Que reste t'il de Pétrone dans le film de Fellini ? Si ce dernier évacue un peu facilement la réthorique subtile du livre (le procés de l'éloquence, les longues poésies de Trimalcion ou les oraisons funèbres, les ruses auprès des Crotoniates) ou des histoires complétes (les soldats garous, les amours avec Circé, les combats contre Lichas et Tryphène, les aventures d'Eumolpe...) il en ajoute (le meurtre de César, les galères, le minotaure, le couple de tribuns et leur maison ), pour mieux donner à son projet l'image d'un songe, le picaresque est ici le portrait d'un empire du fantasme, d'un terrritoire ou jeu mécanique et phrasé animal cohabite en chaque homme, librement. Quoi d'étonnant si on commence au coeur de Rome pour finir vers les îles turques, profiter d'une croisière qui navigue d'un point à un autre d'un Empire dont on a jamais fabriquer autre chose qu'une image dévitalisé. Bien que Fellini range Giton sur le banc de touche pour mieux hétérosexualisé ses personnages principaux, c'est bien un principe de vitalisation d'un imaginaire historique affecté, que Fellini en grand prêtre du cinéma virile, se charge de mettre en branle, plus qu'une adaptation de l'oeuvre de Pétrone... Fini les toges insipides, les soldats en jupettes et les armées d'acteurs américains qui singent l'Antique, il faut retrouver urgemment une vérité. Elle est sexuelle, colorée, boufonne et cruelle. Peu de films de Fellini vont systématiser le jeu clownesque avec autant d'achernement. C'est un véritable procés esthétique, non contre le péplum, mais contre le film historique. Les décors sont systématiquement stylisés dans une épure dorienne absolument renversante (merci Danilo Donati), Nino Rota s'appuie sur des sons simples multi ethniques, peu structurés + une guitare éléctrique, plus le film avance plus son esthétique est cosmopolite et presque evanescente (l'importance donnée aux sols et aux espaces naturels dans la seconde partie, manifeste lorsqu'on s'éloigne de Rome, du goût de Fellini pour la géométrie orientale), les acteurs professionnels et amateurs fusionnent, l'histoire du film respecte les nombreuses incohérences du livre, en étant sans véritable colonne vertébrale. Si Pétrone pastiche et s'amuse des grandes oeuvres de son temps, Fellini lui semble cracher sa colère sur le cinéma historique,tout entier coloniser par le présent, et nous force à croire à cette humanité du rêve et du différent, plutôt qu'à celle sur laquelle nous projetons un semblable, une reconnaissance facile. Pour conclure on pourrait dire que Felllini a réaliser le seul film réaliste sur l'antiquité romaine, s’intéressant bien plus à créer un univers véritable, qu'a reconstituer un passé fantasmé par la recherche historique dédiée au cinéma.