"Sergent York", réalisé en 1941 par Howard Hawks, nous conte l'histoire vraie d'Alvin York, un fermier du Tennessee qui s'enrôla dans l'armée en 1917 pour finir par être l'un des soldats américains les plus décorés de la première guerre mondiale. Son fait d'arme ? Avoir capturé à lui tout seul un bataillon allemand (132 hommes !) dans la forêt d'Argonne en France en 1918. Pourtant Alvin York n'avait pas grand chose d'un héros lorsqu'il vivait au Tennessee, rêvant simplement d'avoir un lopin de terre à cultiver dans une vallée avec sa promise. D'abord buveur invétéré, Alvin finit par trouver la religion et devint objecteur de conscience à ses débuts dans l'armée, refusant de s'enrôler et de combattre. Réalisant qu'il pourrait sauver les vies de ses camarades en ôtant celles de l'ennemi, il changea son fusil d'épaule et se transforma donc en héros de guerre. Forcément cette histoire vraie ne pouvait qu'inspirer le cinéma qui dut attendre un moment avant d'avoir l'autorisation d'Alvin York en personne de pouvoir faire un film sur sa vie. Le résultat, à redécouvrir aujourd'hui, ne manque pas de charme. On y découvre l'histoire d'un homme simple qui se transforme en héros, une histoire typiquement américaine qu'Howard Hawks s'attache à décrire avec le plus de précisions possible, s'attardant allègrement sur la vie de York avant son départ pour l'armée. Le fait est qu'Alvin York est d'ailleurs un personnage complexe, tiraillé entre sa foi et son devoir militaire, un homme autrefois un peu bourru qui s'assagit face à la religion. Gary Cooper, récompensé au passage de l'Oscar du Meilleur Acteur, prête ses traits au personnage à merveille, jouant sur toutes ses nuances avec un charisme et un flegme qui lui va à merveille. C'est d'ailleurs beaucoup grâce à lui que le film fonctionne aujourd'hui car il ne manque pas de défauts. D'abord la réalisation. On a connu Hawks beaucoup plus inspiré et sa mise en scène a pris un léger coup de vieux. Ce qui est presque normal pour un film tourné en 1941 me direz-vous. Si la mise en scène fonctionne très bien sur toute la partie au Tennessee avec ses jolis décors, les scènes de bataille ont l'air trop sages, jusque dans les chutes qu'effectuent les figurants, pas toujours crédibles quand ils meurent. Mais ce qui gêne le plus finalement dans "Sergent York", c'est son propos mélangeant catholicisme et patriotisme. Deux termes toujours un peu fatigants au cinéma quand ils sont complètement pris au sérieux et qui se retrouvent ici réunis dans une espèce de tambouille parfois indigeste. En effet, le film n'échappe pas au prêchi-prêcha qu'il soit moralisateur ou patriotique, n'hésitant pas à montrer (au premier degré) un homme qui devient un héros en abattant quand même plusieurs de ses ennemis comme des lapins (ou comme des dindons, ceux qui ont vu le film comprendront). Alors certes c'est la guerre mais cet élan de patriotisme frise aujourd'hui le mauvais goût. Reconnaissons tout de même à l'ensemble de belles qualités, celles d'un grand film hollywoodien de l'époque, encore bourré de charme mais désormais un peu daté. Dans le genre intemporel, Hawks fera mieux.