Haneke connaît depuis quelques temps un regain d’intérêt, depuis sa seconde palme. Et si certains se déchaînent sur son film, qui n’auraient à les entendre aucune qualité artistique (les idiots, rien que la photo refait à la gueule à la majorité des festivaliers), moi j’ai découvert son cinéma avec ce film que j’avais franchement aimé à sa sortie mais qui m’avait laissé un petit goût d’inachevé. Depuis ce temps je connais un peu mieux Haneke, j’en ai vu quelques autres et aucun ne m’a déçu, mais si j’ai une préférence pour Funny Games, je pense pouvoir dire que Caché est à ce jourle premier de ses films que j’ai vraiment adoré.
S’il y a bien quelque chose que j’aime au cinéma, c’est lorsque le réalisateur va poser sa caméra, faire de longs plans fixes qui durent, sans avoir peur de les faire durer. Récemment, j’ai vu chez De Oliveira un processus assez similaire et ça m’avait bien plu. Mais peut-être n’a –t-il pas cette maîtrise implacable qu’a Haneke. Ça me rappelle ce plan génial dans 71 fragments… où il filmait juste un joueur de ping pong en train de renvoyer des balles pendant plusieurs minutes. Mais ça se ressentait surtout dans Funny Games, où il piégeait la famille et le spectateur, impossible de réchapper aux malfrats.
Ben là c’est la même chose. J’ai presque eu l’impression de voir un film d’horreur tant le film est angoissant parfois. Dès le début, avec ce plan sur la maison pris par on ne sait quelle caméra, les crédits qui s’affichent sur le cadre, on sent que quelque chose ne va pas. On a ce couple qui reçoit des cassettes video d’eux-mêmes dans leur vie quotidienne, ça rappelle un autre film qui vaut le coup d’œil, Lost Highway, et on ne sait pas qui prend les images ou les envoie. C’est finalement très simple, mais Haneke va faire de ça un film admirable. Si j’aime bien Juliette Binoche, je ne suis pas fan d’Auteuil, qui quelquefois m’énerve un peu, mais ici ça ne m’a pas gêné du tout, heureusement. Bien sûr, au fur et à mesure que les envois se succèdent, le malaise s’installe de plus en plus, et tourne à la paranoïa.
Et ce qui est génial, c’est qu’on ne saura rien du tout du début à la fin, on n’a aucune résolution satisfaisante qui nous enlèverait notre malaise . La fin justement, le dernier plan est brillant. Je dois dire que j’ai été vraiment angoissé jusqu’à la fin, ça m’a pris aux tripes. Ce film est étouffant. Et Haneke a toujours cette idée de banalisation de la violence, une scène sanglante en particulier fait l’effet d’une bombe alors que c’est très glacé, très froid mais par la force du plan fixe qui dure ça fait juste froid dans le dos. Ah et je me souviens bien d’une scène assez longue, vers la fin, où Auteuil et Binoche sont dans une chambre d’appartement très sombre, là aussi un plan fixe qui dure et c’est très beau.
Je n’ai pas fini de voir les films d’Haneke, loin de là, mais jusqu’à maintenant, Caché est clairement mon préféré. C’est brillant.