Film culte que je n’avais pourtant jamais vu et que je découvre en 2020. Effectivement le film a tous les ingrédients, souvent déjà énoncés, pour être un monument du cinéma français. Une photo noir et blanc exceptionnelle, au sommet de cette époque, les fameux dialogues de Michel Audiard, percutant, décalés, iconoclastes qui n’ont pas pris une ride. Un scénario solide, sans aucun temps mort. Et bien sûr le jeu de ces monstres sacrés, rassemblés ici, avec peut-être une note de tendresse particulière pour Francis Blanche , moins reconnus que ces collègues Blier, Ventura ou Lefèvre , qui sera souvent cantonné à des rôles dans des comédies loufoques mineures. Bien sûr la scène cultissime de la cuisine, de la préparation des petits toasts, de la descente de la bouteille d’alcool « du pirate » . Mais je rajouterai un point pas souvent signalé et qui fait toute la modernité du film, son intemporalité qui fait que même en 2020 il n’est pas du tout démodé : c’est l’opposition entre les anciens : « les tontons » et les modernes Claude Rich, désopilant en dandy précieux et désabusé , mais surtout à cette jeune actrice allemande , Sabine Sinjen que l’on ne reverra plus en France , mais qui est absolument délicieuse . Son attitude séductrice, sa grâce, son charme, sa désinvolture permettent aux tontons de rebondir, de s’affirmer, de jouer les protecteurs, les « conservateurs » . Sabine /Patricia est le clown blanc, un peu triste, opposé aux clowns rouges gouailleurs. C’est grâce à son personnage et au jeu de Sabine Sinjen ses mimiques, son air de fausse ingénue, libérée mais romantique, et cette voix ensorceleuse ( doublée magnifiquement par Valérie Lagrange ) que le film passe un cran supérieur . C’est cet antagonisme qui donne de la substance au film. Et pour moi c’est ce personnage bien intégré au scénario , qui fait passer le film de 4 à 5 étoiles .