« A ton avis, c’est un faux caïd ou c’est un vrai branque ? »
Troisième film adapté de la trilogie Max le menteur d’Albert Simonin, avec un troisième réalisateur différent, Lautner (après Becker, « Touchez pas au Grisbi », 1954 et Grangier, « Le Cave se Rebiffe », 1961). Au scénario, on retrouve Simonin, comme dans les deux précédents et Audiard, comme dans le « Cave ». Tout comme la précédente, cette adaptation est très éloignée du roman (« Grisbi or not Grisbi ») et ne dépend en rien des deux autres films, sinon par le climat, l’ambiance, le décor.
Exit Gabin (en froid avec Audiard qui aurait réduit son personnage dans « Mélodie en sous-sol », Verneuil, 1963) et avec Lautner à qui il a voulu imposé son équipe technique, c’est Lino Ventura qui interprète le rôle principal. Autour de lui, Bernard Blier dans l’un de ses meilleurs rôles, Francis Blanche parfait, Robert Dalban inébranlable et Jean Lefebvre plus que potable (c’est rarissime!). S'ajoutent également un Venantino Venantini toujours aussi classieux, une Sabine Sinjen cocasse et un Claude Rich mi-truculent, mi-agaçant.
Les dialogues ? La moitié sont devenus culte, inutile de s’arrêter là-dessus, Les Tontons Flingueurs sont sans doute la quintessence du style Audiard.
En vérité, il est difficile de critiquer objectivement ce film que j’ai dû voir une demi-douzaine de fois, à des âges très différents. Comme tout le monde en connaît les scènes les plus cultissimes, autant s’attacher à celles qui le sont moins à commencer par le tout début : Fernand Naudin/Lino Ventura, gangster rangé, est appelé au chevet de son vieil ami à l’article de la mort. Si on retient Audiard aux dialogues, on oublie souvent que le réalisateur de ce film est Lautner, qui sait manier la caméra et faire parfois preuve d’audaces visuelles, comme c’est le cas dans les premières images, l’arrivée en plans fixes de Fernand dans l’appartement de Louis dit « le Mexicain »/Jacques Dumesnil. Un peu plus loin, on peut observer avec quelle maestria Lautner saisit en champ-contrechamp et contre-plongée les mines patibulaires des différents protagonistes.
On a aussi tendance à l’oublier, le sujet du film, c’est une guerre des chefs à la mort du parrain, dans la plus pure tradition mafieuse américaine, avec son lot de scènes d’action violentes et sérieuses même si elles sont toujours équilibrées par les dialogues drôles et parfois aussi poétiques d’Audiard.