"Le professionel" est sûrement le Belmondo que j'aime le moins; étrange, quand on sait que certains le préfèrent à tous les autres. A ma déception, il y a une raison principale : le manque de fidélité de l'oeuvre au travail habituel de ses deux collaborateurs, Georges Lautner et Michel Audiard, ici accompagné de son fils, Jacques, qui faisait ses premiers dans le cinéma et l'écriture. Le soucis est, selon moi, que l'on peine à trouver ce qui a fait la marque de ces trois artistes; problématique donc, tant l'oeuvre peineà se démarquer du reste des productions françaises du genre. Dans le thriller/polar/film de vengeance, on lui préfèrera nombre d'autres productions; je vous laisse faire vos recherches dans les grands classiques du genre. Il manque donc une certaine personnalité à l'oeuvre; au final, elle parait n'être qu'un Bébel de plus, pas franchement mémorable, bien que très convaincant, en y réfléchissant. On ne tient clairement pas le film du siècle, et l'apogée de l'art d'Audiard est loin derrière lui. Mais voilà que le film possède d'indéniables qualités. Premièrement, la mise en scène de Lautner est franchement efficace; c'est pas non plus extraordinaire, mais dans la forme, c'est esthétique, joli, bien foutu. En bref, le courant passe bien, et l'arbre brille de mille feux. La tension passe sans problème, tout comme les émotions, jusqu'à une conclusion terrible et couillue, le genre qui te donne envie de surélever la note. Tout comme pour "Un Taxi pour Tobrouk", la fin mérite que l'on voit le reste. L'efficacité de l'action est, à mon goût, indéniable; ça pète de partout, c'est spectaculaire. Que demander de plus, si ce n'est un Bébel qui voltige de partout, et conduit comme dans "Fast & Furious", mais pour de vrai? Parce que le mec, comme à son habitude, fait toutes ses cascades, risquant sa vie toutes les cinq minutes. Il est vraiment saisissant de constater à quel point ce type était un casse cou. Bon acteur, il l'est également; forcément, c'est Bébel. Le mec trouve, comme toujours, cette limite fragile entre le grotesque et le crédible, entre comique et sérieux. Là est donc sa patte habituelle, et même si cela ne change guère, c'est tellement explosif et surprenant que je n'ai pu qu'acquiecer lors du visionnage. Certains gags semblent tomber de nulle part, cassant un peu le rythme un poil linéaire de l'oeuvre, offrant une réjouissante fugue à son personnage principal. Je dois bien vous le dire, je n'ai guère apprécié l'atmosphère du film, tout de même particulière. On sent que les mecs veulent poursuivre leur style habituel et particulier, notamment au détour de personnages tels que le général, un sacré numéro. Le soucis, c'est que le reste est tellement commun, tellement banal que l'oeuvre se fusille elle-même dans sa volonté de surprendre, ne changeant guère de ce qui se fait habituellement. Quelques incohérences se comptent, ainsi que des passages d'ombre dans l'intrigue, et, en ce qui concerne la mise en scène, le résultat n'est pas toujours garanti. Entre le bon, le médiocre et le décevant, "Le Professionnel" déçoit tout en plaisant, se voulant comme une oeuvre neutre, un peu froide, bien que loin d'être froide ou inexpressive. Les uns aimeront, les autres non. Rien ne change, sous le soleil ...