Dans la lignée des films de fantômes à nous décrocher la mâchoire de rire, Beetlejuice s'impose comme l'un des meilleurs avec le fameux Ghostbusters de Peter Jackson. Burton, après nous avoir délivré un Pee Wee osant le dérapage sans borne jusqu'au grotesque voire jusqu'à l'indigestion, nous largue dans une comédie qui se veut tout aussi décalée mais qui cette fois centre le sujet sur un de ses thèmes de prédilection, à savoir la mort. Barbara et Adam forme l'archétype même du couple bien mignon bien crétin, les riches qui s'installent dans leur maison sont d'odieux bourgeois qui se prennent pour des gens des hautes sphères, leur belle fille est une gothique déprimée...le monde des vivants est affreux, ridicule, empêtré dans des manières outrancières et des sourires mielleux cachant une voracité d'argent, de reconnaissance et d'admiration à toute épreuve, ainsi que des conceptions de la vie qui vont chercher l'absurde tellement elles sont exagérées et caricaturales. Vivre ainsi ce n'est pas vivre, et dans une société aussi pourrie, on ne peux s'isoler sans difficultés monstrueuses, donc Burton se tourne vers la solution la plus évidente et la moins prisée : l'au de-là. Le monde des morts est présenté avec la sympathie pour les monstres que l'on retrouve dans tout ses films, on découvre avec joie toutes ces créatures maquillées avec soin de façon artisanale (ah c'est qu'on en fait plus des horreurs aussi belles!) qui semblent plus amicales ou du moins plus sages et respectueuses que les vivants. Cependant, la vision de Burton n'est pas manichéenne, on peut voir qu'il nuance ses propos avec justesse : si les cadavres semblent au premier abord être plus humains que les habitants de notre monde, Junon n'aide pas Barbara et Adam, elle se contente de les réprimander, de plus, il faut savoir être patient dans le monde des morts. Le grand méchant du film, Beetlejuice, incarné par Michael Keaton à la fois hilarant et ignoble, est un personnage qu'on adore mais dont on a (énormément) conscience de sa nature détestable. Beetlejuice représente la vengeance de Burton sur les vivants, ce qu'il a envie de leur faire subir en retour, mais là encore il faut nuancer : son côté noir prend parfois le dessus lorsqu'il se laisse trop aller et les événements tournent alors mal voire finissent en drame. D'ailleurs, le film mêle des scènes extrêmement drôle (et se permet des délires délicieux comme la danse autour de la table avec les invités) avec des moments plus ténébreux qui font monter l'intensité en puissance comme le final grandiose qui est le point culminant du savoir faire de Burton : être capable de glisser des gags bien foutus qui donnent un ton second degré tout en conservant la montée émotionnelle et la sensation d’impressionnant dans l'atmosphère saturée d'éclair qu'il crée ici sans la moindre fausse note. Ajoutez à cela que le film est saupoudré de trucages assez gores mi rigolos mi effrayants...La musique composée par Danny Elfman en est l'excact reflet sur le plan sonore : des sons de voix sinistres cohabitant avec un air de fête ; l'ensemble montant dans l'épique en parfaite harmonie jusqu'à l'éclatement le plus total. Une réussite, un premier pas pour un très grand réalisateur, et une des meilleures comédie fantastiques qui existent, voilà ce qu'est Beetlejuice.