Alors qu'il arrive à Montevideo en Uruguay, un conseille américain d'une junte sud-américaine est enlevé par les Tupamaros, des rebelles d'extrême-gauche. Au fil d'un interrogatoire, on va peu à peu découvrir qui il est vraiment et pourquoi il est là.
Après les brillants Z et l'Aveu, Costa-Gavras conclut sa trilogie consacrée à des dictatures avec État de siège, où il nous emmène dans l'une d'elles en Amérique latine. Après s'être intéressé aux excès du Stalinisme, il s'en prend cette fois-ci au rôle joué par les États-Unis dans certaines dictatures. Entre manipulation politique, double-jeu, rôles d'ombres et tortures, il dresse un tableau aussi effrayant que puissant, toujours avec un fort aspect réaliste où il se rapproche parfois d'un style plus documentaire.
Comme dans Z et l'Aveu, on retrouve la plume de Jorge Semprun, une écriture d'une incroyable justesse et intelligence, permettant à Costa-Gavras de faire ressortir toutes les réflexions et l'effroi des sujets qu'il aborde. S'inspirant fortement de l'enlèvement de Dan Mitrione, un agent du FBI, il signe une mise en scène sobre mais dégageant une puissance incroyable ainsi qu'une tension permanente qui se fait de plus en plus forte au fur et à mesure que les masques tombent. Avec toujours un certain sens du rythme, il sait prendre son temps lorsqu'il le faut, permettant de nous faire ressentir les sentiments, notamment de peur, que peuvent traverser les protagonistes et il use très bien des flash-backs et coupures. Tout le long passionnant, il rend son film intense, ne nous lâchant pas un seul instant et mettant en place une atmosphère qui se fera de plus en plus oppressante.
La force d'État de siège se trouve aussi dans la façon dont il nous immerge au cœur de ce pays, de l'organisation des rebelles et, dès les premières secondes, nous faisant ressentir le climat local. Peu à peu il met en évidence la façon dont de hautes institutions américaines peuvent jouer des rôles majeurs dans ce genre de junte militaire, tant dans la mise au pouvoir, mais surtout la façon de réduire au silence les rebelles. C'est l'infernale machine américaine qu'il dénonce, et il le fait avec aisance et subtilité, montrant les différentes étapes qui ont peu à peu mené l'Uruguay à la dictature. Et enfin, que dire d'Yves Montand qui livre, à nouveau, une composition aussi juste que sobre et brillante, sachant bien retranscrire les particularités et l'ambiguïté de son personnage.
Avec État de siège, Costa-Gavras nous immerge au cœur des rouages politiques d'une dictature d'Amérique Latine pour livrer une oeuvre qui prend place aux côtés de Z et l'Aveu, engagée, intelligente, passionnante et faisant froid dans le dos.