Camille Claudel par bien des côtés représente la fragilité, la beauté de l'artiste, la fascination qu'il suscite chez les autres, le désordre émotionel et la sensibilité à fleur de peau, la folie, soeur jumelle du génie, ainsi qu'une femme artiste dans un monde d'hommes, une femme qui s'attaque à la pierre, au marbre, et qui le dompte, le plie à sa volonté jusqu'à se détruire elle même, elle méritait donc certainement un film...Nuytten a choisi d'être exhaustif et réalise un film de près de trois heures, qui suit l'oeuvre de Reine-Marie Paris, petite nièce de Camille Claudel, interprétée par la magnifique Isabelle Adjani. Celle-ci transcende littéralement le film, belle et orgueilleuse, est elle même l'allégorie de l'artiste solitaire qui cache un coeur de verre et une imagination fertile derrière deux yeux bleus comme un ciel de minuit. Oui, elle EST Camille et devient particulièrement poignante lors de la descente aux enfers de cette dernière. Elle contrebalance et éclipse Depardieu qui pour moi ne sera jamais un grand acteur car jouant toujours sur la même note, ne nuançant jamais son jeu, Depardieu ne sait jouer que du Depardieu, pour nôtre plus grand malheur. En tout cas les Claudel sont des êtes à part, et la poésie de Paul complète à merveille l'art plus viril de Camille, celle-ci y met sa sensibilité de femme, lui y met sa violence d'homme (cf le moment où le père Claudel récite un passage de Tête d'Or). Nous retiendrons des scènes essentielles du film comme l'exposition des oeuvres de Camille où celle-ci paraît fardée et livide comme une statue et révélant la démense, ou le très beau passage avec Blot, lorsque la Seine est montée. Pour ce qui est de la forme, Nuytten a choisit une facture classique et rigoureuse comme l'art de la sculpture, laissant le soin à la musique et à son actrice principale d'ajouter le côté baroque. On reprochera cependant une passion filmée justement sans passion ainsi qu'une chronologie chaotique et peu claire.