"Across the universe" n'est pas un film de science-fiction, comme son titre pourrait le laisser présager. En réalité, si ce n'est la puissance des émotions qui nous sont transmises, le titre n'a rien à voir (certes, on le retrouve dans une chanson). Le film de Julie Taymor est une comédie musicale, étonnante, sur-colorée, épatante, ridicule, flamboyante, euphorique, révolutionnaire, libre, engagée, déchirante, inépuisable, énergique, kitsch, laide et belle à la fois. Partant dans un esprit déluré et pleinement assumé, la réalisatrice signe un film hors-norme, au-delà de l'expérience, un conte moral au discours simple mais riche, mais totalement transcendé par une mise en scène spatiale et osée. Gratiné de superbes chorégraphies et d'un sens de la concordance musique/image débordant d'originalité et d'intelligence, "Across the universe" est une histoire d'amour universelle, où chaque personnage apprend à payer les conséquences de son attitude idéaliste, de son pouvoir, de son statut inégal, injuste ou rêvé, sur fond de révolution intellectuelle, guerre et substances. Et parce que la musique des Beatles est une des seules à avoir ce formidable souffle intime et épique, qui raconte une personne comme le monde entier, le film est agrémentée d'un bon paquet de leurs chansons, magistralement retouchées (le gospel "Let it be", mythique!). Même si Julie Taymor abuse du symbolisme, c'est au final pour créer une ambiance complètement chamboulée, ou rien n'est précisément clair, dans un monde détruit par ses changements. Malgré 20 minutes un peu laborieuses au commencement, et une scène musicale complètement ratée (celle dans le chapiteau), "Across the universe" reste un film décoiffant, enflé d'idées précieuses, recréant le plaisir du cinéma dans une direction nouvelle, jouant avec l'infinie possibilité de l'esthétisme, dans des couloirs de couleurs variées et tapantes, et des techniques de filmage (le long passage sous acide en négatif, il fallait oser!). Il s'agit donc d'un