La collaboration de Carl Reiner et Steve Martin aura duré quatre films, dont Solo pour deux n'est pas la porte de sortie que l'on attendait. On suit l'histoire d'Edwina, une mourante fortunée qui fait appel à un marabout pour transplanter son esprit dans le corps d'une jeune femme, mais la malchance fait qu'elle héritera plutôt du corps de son avocat (qu'elle déteste, et c'est réciproque). Cette comédie plonge allègrement dans le scénario "esprit qui tente une incrustation dans un corps" (vous avez déjà vu La Personne aux deux personnes avec Alain Chabat ? Vous y êtes) et les gags bébêtes affluent au fur et à mesure que Steve Martin cabotine comme un petit fou, un humour ultra-poussif ce qui finit surtout par nous lasser de notre côté de l'écran. On parle évidemment de Steve Martin, aussi on savait à quel genre de gags s'attendre en commençant Solo pour deux, mais force est de constater que la sauce a plus difficilement pris que d'habitude, entre les manières outrancières qu'il s'oblige à adopter pour nous montrer que "c'est Edwina qui dirige", les voix indigestes qui s'ensuivent, les situations qui deviennent de plus en plus grotesques (personne ne semble réagir à cette histoire de possession quand l'avocat la crie presque sur les toits) jusqu'au final très limite d'un point de vue éthique. On finit en effet par convaincre la jeune fille "visée par la possession" de
donner son corps à Edwina, tandis qu'on la reloge dans le corps...d'un cheval
. Et là, on dit "non", Carl. La miss qui n'a rien demandé se retrouve à ne plus pouvoir changer d'avis (elle dit que cela lui va, mais elle ne pourra plus faire savoir l'inverse plus tard), à hériter d'une espérance de vie réduite, vie faite à manger des carottes et à trotter dans les prés (pour une intellectuelle prometteuse, on tombe bien bas). Évidemment, on réfléchit beaucoup, pour une fin de comédie "à prendre au énième degré", mais on n'a pas pu s'en empêcher devant l'injustice finale qu'on fait passer à grand renfort de mise en scène gentillette. On ne peut pas dire qu'on a ri, loin de là, et l'on s'est même tâté à laisser tomber devant les scènes de jambes en l'air grand-guignolesques entre Steve Martin et Victoria Tennant (du grand n'importe quoi caricatural et assez mal joué), ces scènes où le film semble rigoler tout seul de ses propres blagues (gênant). On aurait pu rigoler ensemble, avec le frétillant Steve Martin et le comique Carl Reiner, mais le film finit comme son titre: en solo.