Dès le 1er plan, on le reconnaît. Une ville, la nuit, des plans en hélico et une caméra qui descend le long de ces immeubles dressés vers le ciel. Michael Mann ne s’intéresse pas au gratin de la société, aux nantis mais plutôt à ces figures sombres qui hantent les bas-fonds de ce monde complètement corrompu. Grâce un énorme camion citerne, les techniciens maintiendront en permanence la chaussée humide et le résultat visuel est tout simplement éblouissant. Car non seulement, et pour reprendre la magnifique formule de Richard Borhinger, c'est beau une ville la nuit mais aucune n'est aussi belle que vue à travers la caméra de Michael Mann. Jeux de lumières, cadrages inédits, reflets bleus aveuglants, toute sa panoplie visuelle qu'il reprendra à travers d'infinies variations par la suite sont déjà là. C'est une pure splendeur visuelle surtout qu'il y adjoint quelques plans et quelques scènes jamais vus alors comme par exemple cet exceptionnel travelling avant qui s'incruste jusqu'à l'intérieur de la serrure que force Frank sans oublier la magnifique séquence du braquage de la Bank of California et sa pluie d'étincelles. Mais un polar de Michael Mann, c'est aussi des éclats de violence, une violence qui surgit de manière brutale, inattendue. Lors de son dernier acte, les images deviennent plus sombres, plus puissantes et le réalisateur s'affirme alors comme l'un des maîtres du ralenti, un art qu'il utilise avec parcimonie mais toujours à bon escient.(...) Ce duel final, souligné par une musique électrisante est l'un des moments fort du film, Mann étant également l'un des réalisateurs qui utilise le mieux cet élément afin de donner plus d'ampleur aux différentes émotions. (...) Un autre fait trop rarement souligné chez Michael Mann, c'est sa direction d'acteurs. (...) Quand il crée un personnage, Mann lui écrit une biographie complète donnant ainsi aux acteurs un background sur lequel s'appuyer. En cela, on sent bien son passé de scénariste à la télévision, cette manière de faire étant typique du milieu. (...) Par contre, comme souvent, les rôles féminins sont un peu plus effacés dans cet univers fortement masculin même si, comme on le verra dans certains films suivants, ce ne sera pas toujours le cas. Pour autant, Michael Mann ne néglige pas l'émotion comme en témoigne la magnifique scène du parloir entre Frank et son mentor Okla, lorsque cette dernière bascule dans quelque chose de très puissant au détour d'une simple question, d'une réponse brusque et d'un regard déchirant. C'est subtil certes mais ça reste très fort. Dans cette ambiance presque crépusculaire, la partition électro de Tangerine Dream participe au ton très particulier de ce polar sombre, aux éclairs de violence certes tardif mais qui marquent vraiment les esprits. Un 1er essai dans le genre qui s'apparente à un vrai coup de maître et qui sera suivi par bien d'autres. la critique complète sur