Quand tu as fait l’effort de t'apprêter pour te rendre au cinéma, que tu mets tes habits de lumière et un zeste de parfum sur ta peau, que tu y vas, en plus, accompagné de ta moitié à qui tu as bien vendu le film, pitch et acteurs compris, pour te faire cette sortie que tu prévoies excitante, c'est la gueule cassée, le nez qui plisse et la moue boudeuse qui s'expriment sur ton visage lorsque tu ressors de la salle à la fin du film...
Ah Prémonitions, tu l'avais pas vu venir c'te deception !
Pourtant tout partait sur de bonnes bases, un casting aux petits oignons, Colin Farrell et Sir Anthony Hopkins quand même, un pitch à te faire saliver des hectolitres de liquide glandulaire...
Et puis paf le chien !
Vous connaissez l'histoire de Paf le chien ?
C'est l'histoire d'un chien qui traverse une rue. Et là, paf, le chien !
Si vous ne la comprenez pas ou qu'elle ne vous fait pas rire, racontez-la à vos enfants. Eux devraient adorer.
Pour en revenir au film, abordons la réalisation. Si on peut appeler réalisation les flashs incessants reçus par le personnage d'Anthony Hopkins, censés nous faire comprendre qu’il a des visions horribles de crimes passés ou à venir, des effets clichesques, des images brouillonnes et éculées qui veulent faire moderne mais sentent méchamment le réchauffé. On frôle l'amateurisme sur certains plans. De nos jours, les séries TV sont mieux filmés que ce bousin qui rappellera de fâcheux souvenirs aux spectateurs innocents qui se sont déjà coltinés « Le témoin du mal », « Copycat » ou « Le Masque de l’Araignée » et tout un tas de sous-Seven qui ont fleuri à la fin des Nineties. Alfonso Poyart, le dit réalisateur, déçoit et fait biper la case « Echec Artistique » sur le flipper du talent. Tilt !
Bon ok, la réalisation n’est pas top mais les personnages ?
Anthony Hopkins a été et reste un acteur exceptionnel. Néanmoins il est beaucoup trop âgé pour le rôle qu’on lui attribue. En voilà une erreur de casting. S’il est impeccable dans son jeu et dégage toujours un magnétisme animal, à 77 ans (il en fait 10 de plus dans le film), et sans manquer de respect à ce grand bonhomme, il n'est pas crédible un instant dans le rôle du père d'une gamine de 20 ans, censé être aussi alerte que le reste du casting alors qu'on le voit peiner dans les scènes où il marche. On souffre pour lui parfois tant il semble épuisé. De plus, on veut nous le faire passer pour un "beau gosse qui avec son sourire charme les femmes" (je cite le film). Hopkins, même jeune, n'a jamais été Sean Connery. Et du coup l’acteur ne correspond vraiment pas au personnage qu’on veut nous vendre. Sans compter les incohérences scénaristiques sur son personnage de « médium ». Parfois il doit toucher à mains nues une peau pour avoir des visions, d’autres fois il touche le manteau d’un personnage mais il réussit quand même à avoir des visions et d’autres fois encore, il a des visions sans même toucher personne… Il faudrait savoir…
Colin Farrell qui joue le tueur en série « ambigu » est transparent. Pas investi ni inspiré, on sent le comédien en retrait. A aucun moment, on ne sent menace ni danger émaner de sa personne. Et ce ne sont pas ses tentatives de regards hallucinés genre je suis un psychopathe dangereux qui y changeront quelque chose. Quand on connaît le talent de ce comédien, c’est exaspérant.
Sa justification pour les meurtres commis est ridicule, d'autant que le scénario fait preuve d'une mauvaise foi crasse lors d'un final nauséabond qui vient contredire tout le propos du film et l'enquête menée par les flics pendant l’heure quarante endurée par le spectateur.
Les autres acteurs, quant à eux, sont interchangeables, sans épaisseur. Qu’ils se rassurent tous, ils ne risquent pas d’attraper l’Oscar cet hiver, au mieux une grippe.
L'idée était sympathique mais sa mise en œuvre est un gâchis total. Quand on sait qu’à la base, ce scénario était prévu pour être « Seven 2 » (véridique !), on soupire de soulagement en se disant qu’au moins, les pontes de Hollywood n’ont pas altéré le chef-d’œuvre de Fincher par une suite qui aurait été lamentable. C’est toujours ça de gagné avant d’aller se coucher, repu, limite gavé.