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Eowyn Cwper
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3,5
Publiée le 1 janvier 2018
septiemeartetdemi.com - En 1942, la production cinématographique française était au plus bas. Au sortir de la guerre, les salles devaient mettre longtemps à se remplir de nouveau. Pourtant, en cette époque d'uniforme et de fusil, Carmen ressort comme un magnifique film de cape et d'épée. Sorti seulement en 1944, il a des airs sombres et des acteurs mutiques qui rappellent un peu les créations soviétiques.
Nouvelle aube pour les carrières de Jean Marais et Bernard Blier, Carmen nous laisse une impression diffuse comme dûe à l'accueil minuscule qu'elle a reçu même a posteriori. Presque comme si on était son premier spectateur, comme si, malgré les parasites, l'image tressautante et floue, la création était vierge de visionnage depuis toutes ces années. Quand on rit d'une rare boutade, on sursaute : qui s'esclaffe ? Bizarre. D'autant plus bizarre la durée : cent dix minutes ?
Christian-Jacque s'ingénie à filmer avec énergie. Le résultat est discret mais frappera l'œil averti. Les dialogues sont sublimes. Le décor est hispanique, les protagonistes aussi. De l'exotique, des combats pourtant. Bref, une étrange œuvre de désespoir, comme si le désir qui la créa voulait recycler le mal ambiant, l'ignorer en le laissant bien en vue. Pas distrayant mais vaut la peine d'être vu.
Viviane Romance fait une jolie Carmen mais sa composition ne va pas jusqu'à en préserver le caractère ibérique...Pour un peu, avec son accent bien de chez nous, on ne serait pas surpris de croiser la Carmen de Christian-Jaque au détour d'un faubourg parisien! Dans l'ensemble, l'interprétation, si on la dépouille de ses costumes et accessoires, relève d'un cinéma bien français, plein de charme sans doute mais pas obnubilé par l'authenticité des personnages. Mi gitane, mi espagnole, Carmen, au tempérament de feu, répond à une vision très commune de la femme espagnole fière et sensuelle. Elle est ici l'héroine d'un récit d'aventures que, sans doute, la nouvelle de Mérimée n'est pas seulement. Sa relation tragique avec ses amants successifs,spoiler: qui meurent brutalement comme les victimes d'une femme et d'un amour placés sous une malédiction, et son instinct de liberté qui lui fait refuser toute dépendance, sont les thèmes principaux de l'oeuvre que l'adaptation de Christian-Jaque traite pourtant assez superficiellement. Peu intéressante d'un point de vue humain, la passion entre Carment et Don José (Jean Marais) semble finalement plus terne que les scènes d'action, où on n'est pas peu surpris de retrouver Bernard Blier, toujours très à l'aise, en brigand espagnol.