Tout simplement jubilatoire. "La vie est un miracle", dans la même veine que les précédents films de Kusturica, est aussi plus optimiste, plus humaniste. Plus proche de ses personnages. Utopiste, même. Le grand Kustu s'autorise cette
fois à raconter une véritable histoire d'amour. Bien sûr, c'est excessif, immense, exhubérant, baroque, ça part dans tous les sens, de l'émotion
intense à l'éclat de rire burlesque. C'est bruyant, ça avance à un rythme d'enfer, n'en finit pas balloter vos sentiments, de jouer avec. Le talent habituel du maître du genre (le sien, de genre). Cette histoire d'amour, Kustu la pousse à bout, dans un romantisme lyrique qui ne craint pas d'aller trop loin - à juste titre (il faut assumer un titre pareil !). Kusturica a un talent unique, même si parfois copié. On peut être plus ou moins sensible à son univers, mais le talent est là, éblouissant. Il vous embarque dans quelque chose qui ne ressemble à rien d'autre. C'est un cinéma des tripes, qui vous les attrape au vol dès les premières images et les premières notes, et ne vous les lâche plus.
Bien sûr, le film se passe, encore une fois, pendant la guerre en Yougoslavie. Et certains iront encore lui demander des comptes sur ses opinions sur la question. Mais à quoi bon ? La Vie est un miracle prend le parti de ne pas en prendre. Elle se place au niveau des humains, qui s'arrangent comme ils peuvent avec la vie et avec la guerre. Le film d'un écorché de son pays qui refuse les prises de position simplistes.
Dans ce contexte, pourtant tragique, La Vie est un miracle reste un film bourré de vie, de joie, un film plein. On en sort heureux, tout simplement. Avec une putain d'envie de vivre. Il ose tout... et on marche.
Et puis, vous avez les trognes, l'ânesse dépressive, les ours croates, les mafieux au nez dans la poudre et les fêtes arrosées comme seuls les slaves savent en faire... toute cette loufoquerie, jubilatoire, tordante même dans les moments les plus tragiques... Inimitable.
Qui a dit, déjà, que Kusturica est un mélange de Shakespeare et des Marx Brothers ? En tout cas, c'est exactement ça.