« Les jeux de l’amour » est la première réalisation de fiction de Philippe de Broca, cantonné jusqu’alors à des documentaires, ou comme premier assistant de Chabrol et Truffaut. Claude Chabrol qui s’était lié d’amitié avec De Broca, produisit ce film dont le scénario co-écrit par Daniel Boulanger reposait sur une idée de Geneviève Cluny, actrice également très proche de cette nouvelle vague qui fixa la tendance de l’époque. Ce courant se retrouve dans le jeu des acteurs, avec d’un côté Jean-Pierre Cassel bondissant et virevoltant, préfigurant les héros des films suivants (avec Cassel également, puis Belmondo), mais égoïste et grossier. Adolescent attardé qui refuse la vie d’adulte et les responsabilités qui vont avec. Face à lui, Geneviève Cluny et Jean-Louis Maury, au jeu daté et déclamatoire, accentué par les dialogues ampoulés de Boulanger, représentent la tradition corsetée d’un idéal bourgeois propre sur soi, en dépit d’une semblant de relation à trois, alors qu’il s’agit seulement de binômes successifs. Cette dichotomie sociétale annonce d’entrée ce que sera le cinéma du réalisateur : un héros qui impose, par sa vitalité et son charme, son non conformisme dans un univers codifié, sous forme de comédies au rythme trépidant. Néanmoins cette intention reste coincée entre un Cassel qui en fait des tonnes et dont le personnage finit par agacer et un rythme inégal par la faute d’un scénario parfois mal scripté, parfois mal dialogué. Considéré à tort comme un film sensuellement osé, il paraît bien sage sur ce plan, comparé aux réalisations de Roger Vadim, Michel Boisrond ou du cinéma italien de l’époque. « Les jeux de l’amour » a vieilli et ses audaces semblent bien tièdes, laissant une impression qui oscille entre agacement et fadeur, à la limite du décrochage.