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TTNOUGAT
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4,0
Publiée le 2 juillet 2013
Qu’est ce qu’il a pris à kaurismaki de mettre en scène cet opéra de Puccini tiré du roman d’un français né à Montmartre? Le résultat est cependant convaincant car si les propos entendus sont vides de sens, le cinéma est superbe pour qui aime ce grand cinéaste finlandais, indiscutablement placé parmi les meilleurs mondiaux actuels. Tout n’est pas toujours très clair et on a du mal à intéresser à ces hommes totalement irresponsables qui ne savent que profiter des autres. Ce n’est le fond qui compte mais la forme cinématographique, originale, personnelle à travers laquelle on ressent parfaitement la vie dite‘’de bohème’’ qui s’apparente plus à la clochardisation. Kaurismaki se complaît avec ces personnages marginaux jusqu’à en aimer leur dérision, Il y met son coeur et son art en décrivant toutes leurs misères et en les transposant à sa propre vision tant au niveau du cadre de vie que des ressentis. Mieux vaut un peu connaitre quelques autres films de Aki Kaurismaki avant de voir celui ci.
L'oeuvre de Kaurismaki est traversée par de nombreuses réminiscences, des variations autour de thèmes communs. "La vie de bohème" en est l'illustration puisqu'elle constitue une sorte de point de départ de sa réalisation la plus récente "Le Havre". Les deux oeuvres ont d'ailleurs en commun le lieu de tournage en France, le personnage de Marcel Marx : écrivain qui se reconvertira par la suite en cireur de chaussure, de nombreux plans de fleurs qui constituent pour le cinéaste un des meilleurs moyens de signifier l'amour, la thématique de l'immigration et enfin la maladie.
"La vie de bohème" est l'adaptation moderne d'un roman du XIXème siècle qui met en scène un écrivain, un peintre et un musicien qui se rencontrent par hasard et décident de mener une vie commune. Ils partagent alors leur misère et leurs maigres espoirs de succès. La beauté du film tient à son caractère à la fois poétique et sobre: si les dialogues sont souvent brillants, ils sont également courts ce qui confère à chaque phrase la qualité du surgissement. En témoigne le commentaire laconique de Marcel Marx au début du film "Ces verres sont plus petits que des visions d'ivrogne".
A la sobriété de Kaurismaki s'ajoute également la fantaisie que l'on retrouve dans des détails (un plat servi au restaurant est une truite à deux têtes, le chien du peintre albanais Rodolfo s'appelle Baudelaire) mais également dans les dialogues comme celui entamé par Rodolfo (qui cherche à vendre la bague qu'il possède le plus cher possible pour s'offrir des tubes de peinture) avec la gérante du mont piété:
"J'ai pitié des enfants, on me les a laissés et mes moyens ne suffisent pas pour les nourrir. Ils pleurent de faim, la nuit. - Ils ont quel âge les petits? - 14...9...7...6...3...2...1....et le plus petit n'a que 6 mois. - Il y en a beaucoup. - Nous étions jeunes et amoureux, c'était le printemps."
La maîtrise par Aki Kaurismaki du décalage poétique et de l'humour qui en découle est le résultat d'un lyrisme contenu, d'un verbe élégant mais qui ne s'étend jamais ou bien encore de scènes dont la brièveté peut parfois surprendre. Un cinéma finalement peu bavard mais qui s'exprime drôlement bien comme l'illustre cette scène de négociation entre Jean-Pierre Léaud (qui joue un collectionneur) et Rodolfo:
"- Ce travail me plaît beaucoup, je paie 1000 francs pour ça. - Vous plaisantez? - 1200 - 2000 - 1400 - 1700 - 1500 plus deux places pour l'opéra de ce soir. - L'Opéra est une forme d'art mourant mais d'accord"
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3,0
Publiée le 7 septembre 2010
Aki Kaurismäki adapte ici le roman d'Henri Murger qui a inspirè l'opèra de Puccini!Le cinèaste finnois plante sa camèra dans les quartiers vieillots de Malakoff pour tourner en noir et blanc cette histoire d'artistes fauchès et d'amours malheureuses dont il transpose l'action dans les annèes 50!Conçue comme une succession de petites scènes,cette chronique des galères d'un ècrivain ratè et de ses comparses,peintre albanais et compositeur irlandais,oscille entre le desespoir et l'humour pince-sans-rire!Les acteurs sont convaincants dont Jean Pierre Lèaud qui incarne ici un industriel amateur d'art dans ce film poètique et tendre...
D’après le roman d’Henry Murger, une comédie mélancolique pas déplaisante, mais qui souffre d’un manque de rythme aussi bien au niveau du récit que dans l’interprétation.
Marcel (André Wilms) est un écrivain français philosophe dont la pièce de théâtre en vingt-et-un tableaux est refusée partout et qui vient d'être expulsé de son appartement. Le locataire qui lui succède est Schaunard (Kari Väänänen), un musicien irlandais, qui interprète sur son piano des compositions sinistres. Les deux hommes se lient d'amitié avec un troisième artiste, Rodolfo (Matti Pellonpää), un peintre albanais sans titre de séjour, qui vit sous la menace d'un arrêté d'expulsion. Les trois hommes et leurs amoureuses, Mimi et Musette, tirent le diable par la queue sans jamais perdre leur proverbial optimisme.
La rétrospective Kaurismäki de Arte s'est terminée au bout de six mois le 30 avril. Elle fut l'occasion de voir ou de revoir quelques uns des films du maître finlandais : "Ariel" (1988), "La Fille aux allumettes" (1990), "Au loin s'en vont les nuages" (1996), "L'Homme sans passé" (2002)... In extremis j'en ai vu le cinquième opus, adapté du feuilleton de Henry Murger publié au milieu du dix-neuvième siècle et qui inspira cinquante ans plus tard Puccini dans l'un des opéras les plus fameux au monde.
Après avoir vu la "trilogie du prolétariat" (dont "Ariel" et "La Fille aux allumettes" constituaient les deux derniers volets), on comprend immédiatement ce qui avait intéressé Kaurismäki dans ces "Scènes de la vie de bohème" : la description de la vie quotidienne de ces artistes sans le sou qu'unit une chaleureuse fraternité. Comme dans "Ariel", comme dans "La Fille aux allumettes", Kaurismäki filme dans un noir et blanc intemporel, qui rappelle les années quarante et le cinéma de Marcel Carné ou de Jean Grémillon, des gens de peu. Aucun misérabilisme, aucun sentimentalisme dans son cinéma quasi muet rempli d'un humour pince-sans-rire volontiers absurde ; mais au contraire une immense humanité qui constitue peut-être le fil rouge d'une oeuvre qui s'est déployée durant près de quarante années et qui se continue encore.
Pour autant, j'aurais tendance à placer cette "Vie de bohème" un chouïa en dessous de ses autres films et notamment d'"Ariel" ou de "La Fille aux allumettes" que j'ai tellement aimés. La raison en est en partie sa durée : "La Vie de bohème" dure cent minutes là où les deux autres, plus ramassés, en comptaient trente de moins. Une autre en est la difficile émigration d'un cinéaste finlandais qui, pour la première fois, filme en France (avant d'y revenir en 2011 pour "Le Havre" où il retrouvera André Wilms, Jean-Pierre Léaud et Evelyne Didi) avec un mélange assez improbable d'acteurs français et finlandais, ces derniers récitant leur texte en phonétique sans manifestement en comprendre un mot.
Du grand art, pas toujours maîtrisé au niveau des dialogues (on imagine que Kaursimaki a dû galérer dans cette première réalisation en français) mais éblouissant cinématographiquement parlant : noir et blanc magnifique, cadres parfaits, acteurs intenses (émouvant Matti Pelompää), BO inspirée, bref un univers de carton pâte plus vrai que nature et un Paris suranné - mais poétique - qui n'aurait pas déplu à Eustache. Bref un mélo assumé, tirant plus du côté de Fassbinder que de Bille August, qui m'avait un peu déçu à sa sortie et qui m'apparaît aujourd'hui intemporel, lumineux et indispensable.
Après " crime et châtiment" de Dostoïevski, " Hamlet" de Shakespeare, Aki kaurismaki adapte ici le texte de R.Urger.
On connaît l'attirance du cinéaste finlandais pour le peuple, les démunis dont il propose le portrait avec son style inimitable.
Tourné en France avec un casting français et finlandais, La vie de bohème" s'attarde sur trois artistes ( un écrivain, un musicien et un peintre qui vivent ensemble à Malakoff), leurs difficultés, leurs amours aussi et la misère qu'ils rencontrent.
Kaurismaki reprendra plus tard, le thème de l'étranger illégal qui tire le diable par la queue ( " de l'autre côté de l'espoir", " le havre").
Malheureusement ici le scénario n'est pas bien ficelé, le montage est beaucoup trop lâche et favorise les longueurs, deux des acteurs masculins sur les trois ont du mal avec la prononciation du français et rendent parfois difficile la compréhension des dialogues.
On mettra au crédit du film, la photo et la réalisation, mais cet opus de Kaurismaki laisse perplexe en terme de réussite, malgré plusieurs moments mais trop rares, qui fonctionnent malgré tout.
Le spectateur occasionnel du travail du cinéaste se tournera avec un bien meilleur bénéfice vers d'autres de ses titres qui constituent ( selon moi) les sommets de son travail (cf " la fille aux allumettes", " Au loin s'en vont les nuages", " l'homme sans passé", " les lumières du faubourg " ).
Près de deux décennies avant Le Havre (2011), Aki Kaurismäki exporte son cinéma en France, plus exactement dans la ville de Malakoff. La vie de bohème tourné en langue français voit ainsi l’acteur finlandais Matti Pellonpää en français dans le texte interprétant un artiste peintre d’origine albanaise ! Il forme avec André Wilms et Kari Väänänen, respectivement écrivain et musicien, un trio d’apprentis artistes dont le peu de succès rencontré les voue à une vie de bohème. Alors que l’opéra est considéré comme un art mort, l’art poétique est pour sa part honoré par Baudelaire, nom attribué au chien, fidèle compagnon du trio. Critique complète sur incineveritasblog.wordpress.com
Un film de Kaurismaki peu connu, tourné en France, qui, par ses personnages et son ambiance, rappelle un peu le "réalisme poétique" du cinéma Français d’avant-guerre et les films de Carné ou de Renoir. Le choix du noir et blanc et l'utilisation de la lumière augmentent cette impression. Il s'agit plus de la description d'un milieu, d'une succession de portraits et de scènes de vie que d'une véritable histoire. Le traitement est simple, dépouillé, distancié, aux antipodes des effets d'un cinéma larmoyant ou spectaculaire. Les traits d’humour sont empreints de bienveillance sur les personnages, et la fin dramatique est émouvante. On sort de ce film plein d’humanité et de mélancolie désespérée avec l'impression d'avoir connu et passé un bon moment avec ces personnages attachants, idéalistes, et généreux.
En déplaçant l’intrigue des Scènes de la Vie de bohème (Henry Murger, 1851) depuis le XIXe siècle jusque dans un XXe siècle sans date véritable, composé par les seuls éléments qui définissent la culture urbaine, comme les voitures par exemple, Aki Kaurismäki entend révéler la prégnance d’une forme de bohème contemporaine flottant entre deux âges, un présent et un passé. Le travail esthétique autour du noir et blanc, cher au cinéaste, sert donc ici de support à une entreprise de superposition de deux cultures, de deux langues, de deux réalités socio-économiques. Voilà ce qui s’appelle adapter une œuvre littéraire, certes. Encore aurait-il fallu que cette adaptation dise quelque chose de la vie d’artiste ainsi thématisée : le grand écart temporel crée un effet de figement qui appauvrit considérablement les bohèmes du second XIXe siècle et rend incongrue leur incursion dans le siècle suivant. Les trois personnages principaux semblent avoir fait fusionner les trois types de bohème distingués par Murger : ignorée, amatrice ou véritable, leur bohème louvoie entre ces terminologies et paraît accoucher d’un état unique, un état qui ne porterait plus en lui ni les étincelles d’une flamme créatrice et dévorant le monde ni le « chic » aguicheur et extravagant, mais les sursauts d’une humanité à l’agonie, fatiguée et aigrie. La relecture de Kaurismäki n’est pas ici en cause ; non, ce qui pose problème, c’est la pertinence d’un jeu de transpositions qui alourdit davantage qu’il ne sert le propos, d’échos à Baudelaire et à l’univers des bohèmes littéraire du Quartier Latin ou de Montmartre alors que celles-ci ne sont guère reconstituées, seulement greffées à une contemporanéité impropre à les recevoir. En résulte une œuvre étrange, à demi réussie, mais à la photographie magnifique et à la mélancolie douce.
Le roman (autobiographique qui plus est) d' un poète ne pouvait être mis à mal que par un intellectuel buté et calulateur comme ne l'est justement pas l'ami Aki. Kaurismakï ne se pose pas de question, il observe, il savoure, goûte la sauce et prend un étrange plaisir à nous faire déguster son immense talent : de frondeur, d'inventeur et de dialoguiste hors-pair. Culte
Ce film constitue l'un de mes plus beau souvenir du cinéma, qui est ma passion depuis toujours. Je me rappellerai toujours à quel point la beauté de sa poésie mélancolique m'a bouleversé. Qui plus est, je trouve que Kaurismaki s'est essayé à autre chose, pas très éloigné de ses autres films, mais tout de même hors catégorie. Une merveille, simple, drôle, triste. Un bijou réalisé par un grand cinéaste, pour les amoureux du cinéma.