Il est bon de voir Michael Bay lâcher ses robots géants de destruction massive quelques temps, afin de s’attaquer à un projet moins ambitieux, et plus traditionnel. En effet, No Pain No Gain marque le retour du cinéaste américain, maître des explosions, à un style plus proche de celui de ses premiers longs-métrages (Rock, Bad Boys). Mais cette fois-ci, le Michael Bay il s’est bien méchamment lâché et nous offre son film le plus réussi, le plus drôle, et surtout le plus abouti après l’excellent The Island. Inspiré d’une histoire vraie assez rocambolesque, le film joue et s’amuse avec la débilité plus que profonde de ses personnages, dans ce qui s’avère être une sorte de parodie musclée et shootée aux stéroïdes de Pulp Fiction, mixée à l’humour noir des meilleurs films des frères Cohen (et oui, rien que ça!). Tout ce qui fait qu’on aime, ou qu’on déteste, le cinéma de Bay est présent dans ce film, mais d’une façon transcendée. Un peu comme si Michael Bay avait pris conscience de ce qu’était son cinéma, et qu’il ait décidé d’en jouer, quitte à s’auto-parodier lui-même, en même temps qu’avec ses personnages. Le film nage du début à la fin dans le second degré le plus total, ce qui donne un festival de débilités et de situations toutes plus barrées les unes que les autres. Ainsi, si No Pain No Gain semble tout d’abord faire l’apologie du rêve américain au travers de ses personnages, c’est uniquement pour le démolir ensuite, complètement. Devant un propos si superficiel et rêvé, voir imaginaire, où les personnages tentent par tous les moyens d’atteindre la perfection, il n’est pas étonnant de voir le réalisateur adapter parfaitement sa mise en scène à celui-ci, proposant une esthétique léchée et colorée, qui il faut l’avouer est vraiment sublime. Le film joue aussi beaucoup sur son côté "inspiré d’une histoire vraie", et n’hésite d’ailleurs pas à nous le rappeler, tout en faisant preuve d’un cynisme surprenant face à celle-ci, ce qui offre alors des séquences hilarantes à s’en démolir les côtes, prouvant que Michael Bay est aussi capable de faire de l’humour un peu plus subtil que celui auquel il nous avait habitué jusqu’à présent. Si le film fonctionne, c’est aussi grâce à son formidable trio d’acteurs (car oui, malgré ce que montre la promo, ils sont bels et bien trois) et d’un cru de seconds rôles tous plus jouissifs les uns que les autres, avec mention spéciale pour Rebel Wilson et Bar Paly, deux forces comiques plus qu’évidentes. Mark Wahlberg semble de plus en plus apprécier les rôles de crétins (après son excellente prestation dans Ted), dans lesquels il s’illustre plus que bien d’ailleurs. La naïveté et l’absence de maturité de son personnage le rendent attachant, tout comme l’incroyable stupidité du personnage de Dwayne Johnson nous pousse à ressentir ce sentiment de compassion forcée par le côté très pathos du personnage. Au final on aime bien les personnages, mais on prend un malin plaisir à les voir se planter et se ridiculiser, c’est là que repose toute la réussite de ce film. Une des séquences de fin est d’ailleurs très semblable, au niveau de la situation qu’elle met en place, à la séquence de Pulp Fiction confrontant Samuel L. Jackson et John Travolta à Quentin Tarantino, juste après le fameux "accident" dans leur voiture. Et pour finir, on saluera l’incroyable bande original, composée par le même homme nous ayant déjà offert le magnifique "Arrival to Earth" de Transformers, et qui a d’ailleurs travaillé sur l’ensemble de la filmographie de Bay (à l’exception du premier Bad Boys): Steve Jablonsky. En conclusion: Avec No Pain No Gain, c’est un sacré coup de maître que frappe Michael Bay en se lâchant complètement dans un sujet qui semblait lui plaire, et qui lui permet de s’amuser mais cette fois-ci de façon un peu plus adulte et cynique. No Pain No Gain est une sorte de bonbon acidulé ultra coloré, de ceux qui vous pétillent dans la bouche. Un film qui en rebutera sans doute plus d’un, vu l’immense bêtise dans laquelle il nage, et surtout vu le ton qu’il prend qui peut-être difficile à cerner au premier abord, comme à chaque fois qu’il s’agit d’humour noir. Dynamique, visuellement époustouflant, soutenu par une bande-son qui détonne, et porté avec une énergie de fer par ses trois acteurs principaux, No Pain No Gain peut se voir décerner sans aucune honte l’appellation de chef d’oeuvre. S’il ne marquera peut-être pas le cœur de tous les cinéphiles, il marquera en tout cas la filmographie de Bay, et espérons-le, remontera le niveau d’estime injustement bas que la plupart portent au réalisateur.