Les Possédés est un film pour lequel je rejoins en très grande partie la critique précédemment postée sur allocine, et qui correspond tout à fait à ce que j’ai pensé au visionnage.
Les deux défauts qui ont fait baissé ma note son d’une part une interprétation parfois inégale, et une histoire sans doute trop complexe pour un film sûrement trop court.
Dans les interprétations inégales, il est souvent question de surjeu, et je suis d’accord avec la critique d’Amchi, on dirait que c’est lié au côté « romantique et rebelle » de certains personnages. Parmi les responsables, je souligne Isabelle Huppert qui en fait tout de même beaucoup par moment, ainsi que Lambert Wilson qui dans le registre « leader ténébreux » se défoule comme un petit fou ! Alors ce n’est pas continuel, et globalement ce sont plus les seconds rôles qui sont touchés, et parfois c’est assez réaliste compte tenu de l’engagement à la limite de la folie des personnages, mais c’est vrai que c’est gênant. Maintenant il y a de très bons acteurs, et ça reste de haute tenue, avec surtout en personnage principal un Chatov, incarné pour le coup avec une précision de métronome par un Jerzy Radziwilowicz remarquable.
Autre défaut donc, dans l’histoire, le côté touffu ! Adapté de Dostoïevski, ce film s’empare d’un sujet passionnant, rare au cinéma, et il y a la fureur, la folie, la gravité que l’on peut espérer dans le récit. Maintenant il y a beaucoup de sous-intrigues qui paraissent peu utilisés, de personnages dont la présence est presque anecdotique (Sharif, Blier par exemple), et cela donne le sentiment que Les Possédés n’a pas une architecture aussi maitrisée qu’on aurait pu la souhaiter. Le film est très accrocheur, mais en même temps on ne peut s’empêcher de penser que quelques passages auraient mérité d’avoir davantage de relief, d’être plus approfondis, quoiqu’il serait malvenu de dire que j’ai beaucoup apprécié.
En revanche, sur la forme, rien à redire. L’image est superbe, l’ambiance d’une exceptionnelle noirceur. Film sans espoir, Wajda nous offre un métrage à la photographie d’une grande tristesse, où les couleurs sont celles de l’hiver russe, où il pleut, où il neige, où le soleil n’est jamais apparent. Remarquablement mis en scène, intense à souhait, Les Possédés est un bijou de tristesse et de désespoir, porté de surcroit par des décors d’une réelle authenticité. On soulignera encore l’usage très particulier de la musique, qui pourra surprendre, qui ne m’a pas enthousiasmé au début, et qui au fur et à mesure du film m’a paru allé à merveille avec ce côté furieux et romantique que Les Possédés cherche manifestement à nous transmettre.
En clair, sans échapper totalement au surjeu théâtral et sans être complètement maitrisé dans sa narration, Les Possédés est clairement un grand film dont je n’attendais pas grand-chose, mais qui m’a réellement convaincu. A voir, en s’attendant tout de même à un film très froid, compliqué et qui ne fait pas rire une seule fois ! 4