À l'origine, il y a un roman de Richard Matheson, The Shrinking Man, dont l'écrivain a tiré lui-même un scénario pour l'adaptation ciné réalisée par Jack Arnold (L'Étrange Créature du lac noir, Tarantula...). Scénario qui comporte assez d'éléments extraordinaires pour faire de ce film un incontournable de la SF et de la série B. Réduit à quelques centimètres, le héros s'établit dans une maison de poupée ; il subit l'attaque d'un chat et fait une chute dans un sous-sol où l'attendent d'autres péripéties : inondation, combat contre une araignée... Tout devient aventure pour la survie, avec des armes et des outils insolites : un crayon, un clou, une aiguille... Les décors et les trucages, notamment les variations d'échelle, sont très réussis pour l'époque. Le spectacle est au rendez-vous. Mais L'Homme qui rétrécit va au-delà du simple film de genre spectaculaire. Le scénario développe une réflexion sur la monstruosité, sur "les limites de l'identité humaine" (selon les termes du réalisateur) et sur la fascination médiatique pour les "phénomènes de foire". Il fait écho également à l'angoisse d'une catastrophe nucléaire liée à la puissance atomique développée par certains États après la Seconde Guerre mondiale. Mais surtout, le film trouve son supplément d'âme et sa vraie singularité dans son dénouement. Il échappe au happy end attendu. Le réalisateur Jack Arnold raconte : "Le studio souhaitait une fin heureuse. Pour les responsables du studio, une fin heureuse signifiait que les médecins trouvaient un sérum capable d'inverser le phénomène de diminution. Carey serait réuni avec sa femme et ils vivraient heureux. Je pensais que cette fin ne convenait pas au film. Je la refusai. Quand nous avons tourné la fin, Grant Williams a commencé pour moi à ressembler au Christ. Toute l'atmosphère était devenue religieuse. J'ai décidé que je voulais une sorte de fin métaphysique, fondée sur mes propres sentiments religieux, mes idées de Dieu et de l'univers" (voir Le Cinéma fantastique, de Patrick Brion). Jack Arnold se livre en effet, via son personnage, à une méditation sur le sens de la vie, sur l'infiniment petit et l'infiniment grand. Chaque créature, aussi infime soit-elle, est une créature de Dieu et tient sa place dans l'univers. Le héros affirme ainsi son existence, sereinement, humblement, et part à la découverte d'un monde inconnu. Étonnant.