A voir d’abord parce que c’est le film qui a inventé le procédé de la voix off. C’est ensuite une des rares œuvres de l’auteur qui n’abuse pas des bons mots et où l’amoralisme ne se limite pas à du cocuage plus ou moins consenti, mais propose une vision bien noire, bien cynique et plutôt profonde du destin individuel comme des règles sociales, avec toute la légèreté de la comédie. Avec l’œil historique, c’est un bon film pour juger de l’état d’esprit de l’entre deux guerres. Le tricheur se repaît dans toute la facticité hypocrite de l’après première guerre, la réalité le rattrape dans la personne d’un ancien combattant mutilé et il en est ruiné. En 1936, date du tournage du film, la seconde guerre était imminente…
Mon premier Guitry. "Le roman" oui c'est ça, on est dans le texte exquis à la française, des phrases savoureuses par leur implacable simplicité dosées d'humour noir. Le tricheur nous raconte sa vie depuis son enfance, jusqu'à cette terrasse de café où il la retranscrit. Enfant, 11 membres de sa famille meurent empoisonnés (champignons) sauf lui qui a été puni pour un larcin : "J'étais vivant parce que j'avais volé. De là à en conclure que les autres étaient morts parce qu'ils étaient honnêtes..." On est dans le comique où l'appréhension des causes et des conséquences des actes est jubilatoire. Les événements de sa vie finissent pas se regrouper les uns aux autres dans un déterminisme savoureux. Guitry s'amuse du déguisement (il le fantasme, avec le poly visage de celle qui fut sa femme), mais triche toujours avec son vrai visage. On sent malgré l'ironie une certaine douleur enjolivée par l'acte même d'écrire et raconter sa vie. ¨Par l'autobiographie il atténue et contourne ses actes de traîtrise (il a passé la guerre à lire et explique qu'il était abandonné dans un hôpital désert) et ainsi s'amuse du mensonge grotesque sur nous, spectateurs. C'est un plaisir d'être la victime de cette duperie. On est dans le roman (là il ne ment pas), le romancé. 1936 : certains propos sont osés : le tricheur est sexuellement ambivalent, donne des techniques de triche, orne sa désertion en 1914... Un grand film à textes. Info Wiki : dans ce film, il inaugure "la voix off" au cinéma.
En 1936, Sacha Guitry fait preuve d’une grande avance sur son temps avec Le Roman d’un Tricheur. D’abord par son « générique » qui consiste en une présentation visuelle et sonore de son équipe technique, des comédiens et du compositeur. Le film est porté quasi-uniquement par la voix de Guitry qui joue tout les personnages avec humour plaçant le film entre le muet et le parlant. Guitry fait preuve d’inventivité à la réalisation qui se soumet complètement au ton du récit qu’il raconte. Ce ton c’est l’humour assez décalé de son auteur qui multiplie les citations drolatique du type « Je suis devenu l’amant de ma femme » ou encore « A Monaco on nait croupier ». Ce ton amusant, cette réalisation imaginative et ce ton un peu amoral de l’anti-héros sympathique font du Roman d’un Tricheur un film bien sympathique.
Heureusement qu’il s’agit d’un roman, car, qu’aurait été le film de Guitry s’il avait fallu réaliser un monologue ?! Original, extrêmement moderne, impertinent, (et pertinent !), LE ROMAN D’UN TRICHEUR a tout pour plaire. Même s’il y a de quoi regretter que le narcissisme de Guitry pose une certaine distance avec le spectateur qui ne se laissera pas berner par la mauvaise foi du personnage. La voix-off est absolument maîtrisée, et le verbiage est finement élaboré (même si le flot de paroles embourbe parfois un peu les tympans). Le générique est génial. Et le film ? Tout autant. La finesse de la parole ne se retrouve pas toujours à l’image, mais l’enchaînement incessant de situations rocambolesques ne nous donne pas tellement le temps de s’en apercevoir. Mais, la grande force de Guitry ne réside pas ici : c’est chez soi, quand on rentre exalté après cette séance, que LE ROMAN D’UN TRICHEUR nous poursuit le plus. Lors du dîner, quand il faut poliment dire que « non, ce soir, on ne mangera pas de champignons ».
Homme de théâtre par excellence, Sacha Guitry n'en demeurait pas moins fort attaché au cinéma, comme le prouve cette étonnante réussite qu'est "Le Roman d'un tricheur". Drôle, extrêmement original d'un point de vue narratif et ô combien intelligent, l'ensemble s'avère être un véritable régal de récit, entre une sorte de mélancolie particulièrement bien rendue et un ton quasiment corrosif qui l'est tout autant. Bref, voila un film comme l'on en fait plus et extrêmement en avance sur son temps : un vrai régal de cinéphile.
En empruntant par curiosité ce DVD, je craignais un peu de m'ennuyer, sachant que ce 1er film de fiction, entièrement assumé par Sacha Guitry, se déroulait en voix off, mais quelle voix ! J'avais oublié à quel point elle était légère et profonde, maniérée et théâtrale,espiègle avec emphase, bref, celle d'un comédien né, et je me suis laissé prendre à ce ton élégant et badin, véritable pied-de-nez à la morale bourgeoise, l'histoire d'un homme qui toute sa vie fut un tricheur malgré lui, comme un signe du destin...Un film spontané et généreux à l'image de son auteur,qui parle de sexe avec d'élégantes périphrases, qui charme et séduit avec désinvolture : une réussite...
évidemment le meilleur film de Guitry, un cerveau génial qui inventait sans cesse des nouvelles histoires pour se moquer de ses contemporains. C'est drôle du début à la fin.
Ici, Guitry montre encore toute son originalité a travers un film dans lequel seules environs 10 minutes sont parlés. Le reste est constitué de la voix off, celle du réalisateur. Guitry en est même a nous raconter une histoire. Les images ne sont pas forcément nécessaire a la compréhension de l’histoire. Cependant, on aime voir les images, le jeu des acteurs et les regards (très importants). Le générique est comme pour « Si Versailles m’était conté » encore une fois très original. Le scénario ingénieux et la fin vraiment très amusante.
Le chef-d'œuvre de Sacha Guitry ! Film aux trois quarts muet bercé par la voix off de son réalisateur... et cependant d'une incroyable modernité ! En moins d'une heure trente, Sacha Guitry démontre ici toute son intelligence, sa finesse, son humour et son sens aigu du récit. Là où d'autres se seraient englués dans le drame et le mélo, Guitry joue de toute son habileté pour rendre une copie drôle, enlevée, enjouée et méchante à souhait. Une grande leçon de cinéma.
Sincère et malicieux, le roman d’un tricheur fait parti de ces films qui laissent le spectateur meilleur après sa vision. En avance sur son temps au niveau de la réalisation, captivant par son propos et envoûtant par sa mise en scène, Voilà un film à ne pas rater.